30/08/11

Safari, Musée des Beaux-Arts Nantes : La place et le role de l'animal dans la création artistique


Le musée des Beaux-Arts de Nantes propose jusqu'au 25 septembre 2011 un parcours spécifique dans ses collections permanentes sur le thème de l’animal et s’associe à l’exposition SAFARI conçue par le commissaire Patrick Joly pour le Lieu Unique (10 juin - 4 septembre), ainsi qu’à l’exposition d'Emilie Pitoiset à la Zoo Galerie (10 juin - 16 juillet). En résonance, le Frac des Pays de la Loire décline la même thématique avec Animaux/Animots (10 juin - 25 septembre).

LA PLACE ET LE ROLE DE L'ANIMAL DANS LA CREATION ARTISTIQUE

Ce parcours qui traverse les siècles amène à constater que chaque époque a son bestiaire de prédilection. La déambulation chronologique, signalée par des cartels spécifiques, permet de saisir la place et le rôle de l’animal dans la création artistique.

Aux XVIe et XVIIe siècles, les représentations animales sont le plus souvent chargées de références bibliques, mais également mythologiques ou proverbiales. Ainsi, les animaux de l'arche de Noé de Grechetto célèbrent le repeuplement de la terre après le déluge raconté dans l’Ancien Testament. Le chardonneret de Bernado Daddi annonce symboliquement le sang versé pendant la Passion du Christ. La préfiguration du sacrifice du Christ est aussi évoquée par la présence de l'agneau sacrifié de la Cène, peint par Mariotto Di Nardo, comme dans la toile de Guido Reni. Ici l’agneau est aussi employé comme attribut et permet l'identification de saint Jean-Baptiste. La déesse Diane chasseresse, de Gentileschi, est quant-à elle reconnaissable grâce à son lévrier. Osias Beert, s’inscrivant dans une tradition qui remonte au Moyen-âge, utilise la figure du singe comme miroir de l'homme en ironisant sur les bas instincts animaux qui le poussent à la faute.

Héritier du réalisme flamand, le portrait animalier devient populaire au XVIIIe siècle, grâce notamment à la passion des souverains Louis XIV et Louis XV pour leurs chiens et pour la chasse à courre. A partir d’études d'après nature, Jean-Baptiste Oudry, Alexandre-François Desportes et Christophe Huet dépeignent de manière très réaliste ces animaux domestiques ou sauvages. 

Cette tendance se confirme au XIXe siècle avec le maître incontesté du paysage animalier Jacques Raymond Brascassat. Il offre à ses scènes animalières des paysages proches de ceux de l'école de Barbizon, ainsi que des formats monumentaux. Dans un contexte darwiniste, Emmanuel Fremiet apporte à la sculpture animalière une dimension scientifique en étudiant les espèces animales au Muséum d'histoire naturelle et en citant le nom savant de l’animal Gorille – groupe plâtre, Troglodytes Gorilla (sav.) - du Gabon. De plus, afin de se hisser au rang de statuaire, il introduit la figure humaine par le biais de luttes de l'animal contre l'homme.

En ce début du XXe siècle, passionné par les animaux du Jardin des Plantes de Paris, François Pompon abandonne le rendu réaliste en éliminant l'accessoire et le détail pour ne capter que « l'essence même de l'animal ». En privilégiant les contours, les volumes dépouillés, simples et lisses, le sculpteur dote ses œuvres d'une forme universelle radicalement moderne. 

Au XXe siècle, les artistes contemporains favorisent la thématique de l’animal - miroir de l’homme et de son animalité. A l'instar d'Henri Cueco qui raconte l'homme par la figure canine, Maurizio Cattelan, matérialise avec un spécimen d'autruche naturalisé l’expression « faire l’autruche ». General Idea revisite l’histoire de l’art avec ses trois bébés phoques en peluche à la dérive, personnifications des trois membres du collectif. Francis Alys montre quant à lui l'attitude de l'homme, ici le "gringo", l'étranger, le touriste, pénétrant en territoire inconnu et entrant en conflit avec l'animal, encore une fois ici miroir de l'homme.

L'œuvre de Rosemarie Trockel, prend une dimension féminine et joue de la dialectique du vice et de la vertu : la blancheur quasi virginale de la chemise est troublée par la présence de l’araignée, métaphore de la mort et/ou de l’abandon. On retrouve cette même fragilité face au monde chez les animaux gisants de Christine Laquet. Rebecca Horn personnifie la veuve noire, cette araignée au venin dangereux qui tue le mâle après la copulation. A l'aide d'un moteur, l'artiste met en scène la séduction avec ces plumes qui se déploient, tel un oiseau qui fait la roue. 

D’autres artistes, tel que John Murphy, s'inspirent quant-à eux des cabinets de curiosités constitués par les collectionneurs érudits des XVIe et XVIIe siècles, qui rassemblent des objets et animaux extraordinaires. En écho, l’œuvre de Jana Sterbak avec cette main dont les doigts sont revêtus de cônes fabriqués à partir de mètres de couturières, fait directement référence à l’image de cornes de rhinocéros ou de taureau. Enfin, chez Chloe Piene et Fabrice Hyber, des créatures hybrides à la fois humaines et animales apparaissent dans des compositions énigmatiques. 

LISTE DES ARTISTES 
16e siècle : Bernado Daddi, Mariotto di Nardo
16e & 17e siècle : Il Grechetto, Guido Reni
17e siècle : Giovanni Battista Beinaschi, Orazio Gentileschi, Osias Beert, Frans Snyders
18e siècle : Jean-Baptiste Oudry, Christophe Huet, Alexandre-François Desportes
19e siècle : Jacques Raymond Brascassat, Emmanuel Frémiet
20e & 21e siècle : Maurizio Cattelan, Francis Alÿs, Henri Cueco, Rebecca Horn, Fabrice Hyber, Christine Laquet, John Murphy, François Pompon, Anri Sala, Jana Sterbak, Chloe Piene, Rosemarie Trocke

En écho à SAFARI (Salle Blanche) Spike waves  de Jean-Claude Ruggirrello présente une installation vidéo et sonore inédite mettant en scène une tortue et des grillons.

Musée des Beaux-Arts de Nantes