Exposition sur l’apparition de l’aquarelle chez Auguste Rodin
Naissance de l’aquarelle
Musée Rodin
28 juin - 18 septembre 2005
En l’espace d’une dizaine d’années, entre 1887 et 1899, les dessins de Rodin vont subir une métamorphose radicale : ce qui, jusqu’à cette date, était essentiellement lié à des études pour La Porte de l’Enfer, sujet grave et sombre inspiré de Dante, va se transformer en un furieux mouvement de recherches tous azimuts. Les dessins de type michelangesque, de petit format, fortement contrastés, aux tonalités noires et blanches, qu’on appelle les « dessins noirs », seront remplacés, au bout de cette période, par de grands nus, féminins pour la plupart, subtilement colorés de lavis d’aquarelle et de gouache. Petits dessins noirs et grands nus colorés sont comme les deux pôles de l’œuvre dessinée de Rodin.
Entre les deux, devenu un artiste reconnu, Rodin expérimente. D’abord, le croquis rapide de modèles en mouvement (danseuses de toutes sortes, les javanaises, Loïe Fuller, la danseuse américaine aux larges voiles). Ensuite, le dessin d’après nature de jeunes modèles, qu’il fait poser plus ou moins nues ou costumées (mantilles, masques, casques, robes à l’antique…) et l’utilisation des moments « morts » de la pose (déshabillage, rhabillage) comme des motifs dignes d’intérêt. Ce sont les dessins dits « de transition ».
Comme à son habitude, Rodin va se servir des motifs qui l’intéressent le plus comme des matrices réutilisables à volonté grâce au calque, pour en faire des figures dont il pousse plus ou moins l’étude selon différentes techniques : toujours la mine de plomb en base, la plume et l’encre, l’aquarelle et la gouache.
Ici, le plus remarquable, c’est l’apparition de la couleur : devenu léger, le sujet appelle des couleurs d’aurore, chaudes et pleines de gaieté, où domine le rose vif, le fuschia et le jaune d’or pour la chevelure. Rodin, d’ailleurs, a un goût prononcé pour la bichromie et, s’il utilise souvent une seule couleur, il n’en mélange jamais plus de trois.
Toutes les possibilités de la couleur sont explorées. De même format que les dessins noirs, de même technique —notamment en ce qui concerne l’utilisation de la plume—, d’une forte unité de couleur et de thèmes, ces dessins mal nommés « de transition » sont une étape à part entière de l’oeuvre graphique de Rodin. Après eux, Rodin gardera comme un acquis la couleur et l’utilisation libre des lavis pour rehausser ses dessins. Il n’utilisera plus, par contre, sauf très exceptionnellement, la plume.
En 1899, Rodin donne un dessin « de transition » comme frontispice au Jardin des Supplices d’Octave Mirbeau : une femme qui se déshabille, avec un lavis d’aquarelle rose et jaune. Mais dans les recherches de Rodin, il fait déjà partie du passé. La même année s’ouvre aux Pays-Bas sa première exposition monographique. Il y montre de grandes aquarelles de nus, où le lavis d’aquarelle épouse la forme des figures. Bientôt la couleur couvrira toute la surface de la feuille, au point d’en occulter, parfois, le motif. Elle tend à prendre le pas sur le dessin. Changement de format, de thèmes, de centre d’intérêt : c’est une nouvelle période qui s’annonce.
MUSEE RODIN
79, rue de Varenne
75007 Paris