(c) Pilar Albarracin, Sans titre, 2009
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Courtesy Galerie Valois, Paris, 2009
Pilar Albarracín se consacre depuis le début des années 90 à créer des performances et des installations parodiant les lieux communs de la culture ibère.
Pour sa première exposition personnelle à la galerie Valois, l’artiste pose son regard ironique sur l’un des objets les plus archétypaux et répandus de nos sociétés : la carte postale et tout particulièrement sur l’atmosphère folklorique qui s’y perpétue.
Pilar n’exagère pas lorsqu’elle souligne que le « souvenir d’Espagne » qui domine l’imaginaire des étrangers (güiri) se trouve dans les estampes « flamencas ». Si, d’un côté, elle revient à la politique iconico-touristique du franquisme - à cette fiction d’un territoire méridional et festif, coloré et sensuel - elle produit parallèlement une fissure sarcastique dans le discours d’intégration de l’Espagne au sein de l’Europe. Nous sommes, en effet, passés d’une époque de préjugés et de fantasmagories à une autre, mondialisée, dans laquelle on ressent presque partout le même ennui.
Le folklore est une force qui permet aux groupes sociaux de se reconnaître par des signes et des styles qui codifient l’identité et perpétuent les significations nationales. Ainsi, une tradition telle le flamenco favorise l’expression des inquiétudes existentielles et politiques du peuple espagnol alors que naissent de nouveaux conflits entre identité locale et mondialisation.
Dans la « carte postale flamenca » dont les standards sont fixés dans les années 60, tout, depuis les poses de danse imitant la cour amoureuse aux couleurs outrancières et aux sourires éclatants, concourait à créer un univers de rêve qui contrastait avec la répression politique. Ces figurations de fable étaient le sous-produit décisif d’une diplomatie totalitaire.
En pastichant cette iconographie, faisant passer par le filtre d’un humour corrosif et incisif ces prototypes et stéréotypes, Pilar Albarracín confronte la mémoire historique de l’Espagne franquiste à l’abêtissement de notre société de consommation qui trouve sa consolation dans le divertissement effréné et la gadgetisation. La carte postale permet d’établir parfaitement la logique du déjà vu. Nous avons tous succombé à cette envie de faire ou d’acheter des cartes postales bien que nous sachions parfaitement qu’il ne s’agit là que de clichés ; il faut bien reconnaître que nous ne visons d’ailleurs pas autre chose.
En s’appropriant les jeux de rôles de l’imagerie touristique, l’artiste crée une évocation du passé qui cherche à nous provoquer.
Ses cartes postales, comme des fétiches, sont en rapport avec la castration, avec quelque chose qui manque et qu’il n’est pas facile de restituer.
De ce paternalisme militaire, machiste et condescendant pour la culture populaire et folklorique, il semble bien qu’il ne restera pas grand-chose. En tout cas, c’est ce que nous aimerions croire.
Galerie Georges-Philippe et Nathalie Vallois, d’après le texte « Souvenirs sarcastiques » de Fernando Castro Flórez écrit à l’occasion de l’exposition de Pilar Albarracín au Palacio Episcopal de Málaga
Pilar Albarracin
Exposition du 29 mai au 19 juillet 2009
Vernissage le jeudi 28 mai 2009
Galerie Valois
36, rue de Seine
75006 Paris