27/02/00

Auguste Chabaud (1882-1955), Fondation de l'Hermitage, Lausanne

Auguste Chabaud (1882-1955)
Fondation de l'Hermitage, Lausanne
25 février - 28 mai 2000

Né à Nîmes en 1882, Auguste Chabaud fréquente l'Ecole des Beaux-Arts d'Avignon, puis monte à Paris en 1899 pour y poursuivre sa formation artistique. La frénésie de la métropole, sa modernité agressive fascinent le jeune peintre, qui reste en même temps profondément attaché à sa Provence natale, parcourue par le rythme lent, immuable, de la vie rurale. De la tension entre ces deux pôles, Paris et le Sud de la France, va naître une oeuvre puissante et singulière. Réunissant près de 100 tableaux et plus de 50 dessins, l'exposition offre un panorama rétrospectif de cet artiste hors du commun, qui voulut "puiser, sans intermédiaire, à même la vie".

Auguste Chabaud expose dès 1907 au Salon des Indépendants et au Salon d'Automne, aux côtés des principaux protagonistes du fauvisme. A Montmartre où il a son atelier, il peint les rues animées et bigarrées, les enseignes lumineuses et les divertissements populaires (Le Moulin Rouge, la nuit, 1907). Ses scènes de la vie parisienne ne font aucune concession à l'anecdote; beaucoup ont pour thème la prostitution, qu'Auguste Chabaud aborde d'une manière franche et directe, non dépourvue de brutalité, mais sans complaisance ni pitié (Fille à la cravate rouge, 1907). Dès les débuts, il recherche l'expressivité du coloris, recourt à une écriture rapide, synthétique, proche parfois de la caricature. Juxtaposant les couleurs crues, cernant les formes d'un trait noir épais, il saisit les figures frontalement ou découpe leur profil, décrit la solitude des hommes dans le monde moderne. Ses paysages urbains vigoureux, traités dans une palette plus austère, montrent des rues et des places désertes (Montmartre, construction du Sacré-Cœur, 1907-1908), des lieux de passage anonymes (Couloir d'hôtel, 1907-1908), et traduisent la même volonté d'aller vers l'essentiel.

Après la Première Guerre mondiale, le peintre s'établit définitivement à Graveson, petit village près d'Avignon où se trouve le Mas de Martin, domaine familial dont il reprendra bon gré mal gré la gestion. Fier de ses racines, Auguste Chabaud revendiquera toujours un art instinctif, et une position marginale dans le champ artistique: "Le peu que je sais, je l'ai appris non dans les ateliers suffocants où je n'ai pu vivre […], mais en suivant les laboureurs et les bergers", écrit-il en 1912 dans la préface de son exposition à la galerie Bernheim-Jeune, "j'ai dessiné ce que j'ai vu autour de moi (paysans, bergers, chevaux, vaches, etc., et ces drames de la vie simple, la mort de la brebis ou la mort du cochon)". Les séries parisienne et provençale (il y travaille parallèlement jusqu'en 1913, date à laquelle il quitte la capitale) manifestent des influences réciproques. Les habitants de la campagne sont, comme ceux de la ville, abstraits en types (Vieilles Provençales à l'église, 1909); le paysage, résolu en formes simples, est construit à partir de quelques éléments emblématiques (Rue de village, 1909). Dépourvue de tout folklore, la Provence est, dans ces images, monumentale; brûlée sous la lumière implacable du soleil, elle se présente comme figée dans une intemporalité, un silence qui placent, ici encore, l'oeuvre du peintre sous le signe de la solitude.

Dans les années vingt, Auguste Chabaud travaille dans des couleurs vives, dominées par un bleu de Prusse éclatant (Village de Graveson, 1924-1925). La pérennité et l'âpre beauté de la Provence vont s'incarner désormais dans la Montagnette, une petite chaîne de montagne voisine du Mas de Martin, que l'artiste peindra inlassablement, dans une vision empreinte de sérénité et de lyrisme (Paysage dans la Montagnette, 1928). Au cours des décennies suivantes, Auguste Chabaud - qui est représenté dès 1936 par la galerie Katia Granoff - va continuer d'exposer aux grands Salons de Paris, même si sa production se trouve ralentie par l'exploitation de son domaine.

L'oeuvre d'Auguste Chabaud a fait l'objet de nombreuses rétrospectives dans les musées français, notamment à Nîmes (1946, 1956 et 1989), Aix-en-Provence (1950, 1960), Marseille (1956), Montpellier (1961), Toulon (1968), Brest (1978), Saint-Tropez (1984), Orléans (1986) et Troyes (1989). Plusieurs expositions monographiques lui ont été consacrées en Europe, notamment à Saarbrücken-Wuppertal-Munich (1993), Bochum (1994), Gand (1996) et Copenhague (1996-1997).

L'exposition qu'accueille la Fondation de l'Hermitage a fait étape dans les musées de Dessau, Wiesbaden, Emden et Coblence, et sera ultérieurement montrée à Paderborn et Maastricht. Elle est enrichie, pour sa présentation à Lausanne, par des prêts du Musée du Petit Palais à Genève, et par un ensemble d'oeuvres majeures provenant de l'ancienne collection de Josef Müller, conservées dans des collections privées suisses.

FONDATION DE L'HERMITAGE
2, route du Signal - CH - 1000 Lausanne 8
www.fondation-hermitage.ch