09/04/10

Exposition Maîtres d’Art – Vitrines du Palais Royal

 

Métiers d’art en scène – Les Maîtres d’art


Vitrines et grilles du Palais Royal,

ministère de la Culture et de la Communication

Jusqu’au 17 juin 2010

 

Depuis l’automne, le ministère de la Culture et de la Communication, propose au public un cycle d’expositions dans les galeries du Palais Royal consacré aux Métiers d’Art. Après les costumes de scène du Centre national du costume de scène de Moulins (CNCS) et le « mobilier, tapisserie et céramique » des artisans d’art du Mobilier national et de la manufacture nationale de Sèvres, la nouvelle exposition « Les Maîtres d’Art », est la troisième dans le cadre de ce cycle « Métiers d’Art en scène ». Héritiers de traditions ancestrales, les Maîtres d’Art sont des professionnels d’excellence qui maîtrisent des techniques et des savoir-faire tournés vers l'avenir.

Ce cycle d’expositions est une occasion pour le Ministère de mieux faire connaître les métiers d'art du grand public. Le ministère de la Culture a en outre annoncé un ensemble de mesures en faveur des métiers d’art et notamment :

• L’annualisation des promotions au titre de « Maître d’art ». Initialement décerné tous les deux ans, le titre de « Maître d’art » est désormais annuel. Cela permet d’accélérer la distinction des professionnels le nombre de bénéficiaires du titre.

• La création de l’Institut national des métiers d’art (INMA) : Cette nouvelle structure interministérielle est destinée au développement et à la promotion des métiers d’art en France et à l’étranger.

•  La reconstitution du conseil des métiers d'art. Créé en 1994, le conseil des Métiers d'art procède à la sélection des candidatures des Maîtres d'art. Le Ministre a décidé d’en revoir sa composition qui sera plus restreinte : il passe d'un collège de 30 membres professionnels à un collège de 15 membres. Cette nouvelle organisation sera mise en place dans le courant du printemps.

 

Le dispositif des Maîtres d’art

Créé en 1994, le titre de Maître d'art a été inspiré par les Trésors nationaux du Japon. Héritiers de traditions ancestrales, les Maîtres d’art sont des professionnels d’excellence, dotés de savoir-faire d'exception dans des domaines aussi divers que la broderie, la verrerie, la céramique, la joaillerie, l'orfèvrerie, la facture instrumentale etc. Le ministère de la Culture et de la Communication décerne ce titre à vie, à la fois pour mettre en valeur ce patrimoine extraordinaire et tous ceux qui en sont aujourd'hui les dépositaires, mais également pour encourager sa transmission. Depuis 1994, ce sont ainsi quatre-vingt neuf professionnels d'excellence qui ont été désignés pour transmettre aujourd'hui leur art à une nouvelle génération permettant à des savoir-faire ancestraux de se perpétuer et de se renouveler, en assurant une collaboration réussie entre patrimoine et création.

En outre, le savoir-faire des Maîtres d'art concourt au rayonnement de la vie artistique et culturelle dans des domaines aussi variés que les arts plastiques, le design, les métiers de la mode, le patrimoine monumental, le livre etc. Nombreuses de leurs réalisations sont en effet le fruit de collaboration avec des créateurs, tels que les vitraux de Pierre Soulages à la basilique de Conques réalisés par le peintre verrier Jean-Dominique Fleury, les livres d'artistes et les œuvres de Niki de Saint Phalle, Paul-Armand Gette, François Bouillon réalisés par le sérigraphe Alain Buyse, les clavecins réalisés par Reinhard von Nagel et décorés par Marc Chagall, Olivier Debré, Alechinsky et Jiri Kolar, la création joaillère de Christian Adrien pour la Maison Cartier, les costumes de scène réalisés par Danièle Boutard pour Patrice Chéreau...

 

L’exposition dans les vitrines du Palais Royal

Accès ligne 1, Métro Palais Royal - Musée du Louvre
Horaires d’ouverture du jardin 
jusqu’au  31 mai : 7h00 - 22h15
du 1er au 17 juin : 7h00 - 23h00

 

> Vitrine 01 :

Luigi Bergamo - Fondeur - Année de promotion au titre de Maître d'Art : 1998
Le faux miroir - Matériaux : fonte à la cire perdue et au sable

Anne Hoguet - Évantailliste - Année de promotion au titre de Maître d'Art : 1998
• Paradis Vert - Matériaux : Gala façon écaille plumes de paradis
• Brise de Printemps - Matériaux : Nacre Blanche, feuille brodée, application organdi sur organza
• Libellule - Matériaux : Os, feuille brodée, application sur organza

Roland Daraspe - Orfèvre - Année de promotion au titre de Maître d'Art : 2002
• Vase Tilleul - Matériaux : argent massif
• Licorne - Matériaux : argent massif – lapis lazuli
• Vase Graine - Matériaux : argent massif

Jean-Louis Hurlin - Forgeron d’art – Sculpteur - Année de promotion au titre de Maître d'Art : 2000
• Coupe Paracas - Matériaux : Acier damassé
• Coupe Chavin - Matériaux : Acier damassé

> Vitrine 02 :

Lison de Caunes - Créatrice et restauratrice de marqueterie de paille - Année de promotion au titre de Maître d'Art : 1998
Deux tables gigogne  - Matériaux : marqueterie de paille sur bois

Françoise Hoffmann - Artiste feutrière - Année de promotion au titre de Maître d'Art :  2008
Givre, Manteau sculpture en feutre « nuno » - Matériaux : Laine mérinos, tulle et soie

Pierre Gaucher - Sculpteur - Année de promotion au titre de Maître d'Art : 1996
Tôle écrite noirematériaux : acier doux

Patrice Cloud - Tourneur - Année de promotion au titre de Maître d'Art : 2008
Matériaux : porcelaine

> Vitrine 03 :

Michel Petit  et son élève Stéphane Petit - Maître verrier - Année de promotion au titre de Maître d'Art : 1996
Deux tableaux verriers : La Croisée Des Chemins,Verre En Feu - matériaux : verre

Isabelle Emmerique - Laqueur - Année de promotion au titre de Maître d'Art : 2006
Grand Mouchoir Rouge - matériaux : laque

Marie de la Roussière - Laqueur - Elève d'Isabelle Emmerique
Triptyque, Pierres - matériaux : vernis gras européen

Sylvain Dechiron - Marqueteur - Elève d'Eric Sanson
Papiers découpés chinois - Matériaux : bois marqueté.

François Verzier – Manufacture Prelle - Tisseur artisanal de soieries - Année de promotion : 1994
•  Lampas Suzanne Lalique - Matériaux : soie
•  Saturne - Matériaux : velours ciselé

> Vitrine 04 :

Marie-Pierre Bel-Gary - Tourneuse sur bronze d'Art - Elève de Bernard Werner
Vase luminescent « Nénuphars » Hommage à Majorelle - Matériaux :  Bronze ciselé et verre

Yves Benoit - Gaufreur, Imprimeur et Façonneur de velours - Année de promotion : 2006
Velours Alto Basso - Matériaux : soie, mohair et coton

Philippe Rault et son elève Naoya Miyake - Facteur de cuivres - Année de promotion : 2002
•  Ophicléide début du XIXème siècle, instrument de la famille du serpent. - Matériaux : alliage non ferreux, laiton (cuivre et zinc)
•  Création Philippe Rault et Naoya Miyake – prototype trompette contemporaine naturelle en ré - Matériaux : alliage non ferreux, laiton (cuivre et zinc)
•  Restauration d’un cornet à pistons F. Besson 1868 - Matériaux : alliage non ferreux, laiton  (cuivre et zinc)

Georges Alloro - Facteur d’instruments nouveaux - année de promotion : 2008
•  Guitare-veena II - Matériaux : bois-métaux
•  Tambour papillon - Matériaux : bois -syntéthique

> Vitrine 05 :

Reinhard von Nagel - Facteur de clavecins - Année de promotion : 1994
Clavecin de l’ecole lyonnaise du XVIIIe siècle d’après un instrument ancien attribué à Christian kroll, Lyon, vers 1770 - Matériaux : bois, fer et laiton

Nelly Saunier - Plumassière - année de promotion : 2008
Le Dragon - matériaux : plumes de tragopan, faisan commun et doré, paris,oie,paon.

> Vitrine 07 :

Nico Chardel - Artiste Ferronnier d’art - Elève de Pierre Gaucher
« Travaille à la chaîne » - Matériaux : acier, maillons de chaîne, cire d’abeille

Marcelle Lubrano-Guillet - Parurière florale - Année de promotion : 2002
•  Rose Thierry - Matériaux : satin de soie
•  Colombe - Matériaux :  soie et dentelle de soie perlée + plumes de coq
•  Rose Belle Epoque - Matériaux :  cuir
•  Orchidée algue - Matériaux : mousseline de soie + imprimé main

Pierre Reverdy - Coutelier en art damassé - Promotion 2004
Couteau - Matériaux : Acier forgé

> Vitrine 08 :

Patrick Robin - Luthier du quatuor à cordes - année de promotion : 2000
•  Gabarit de violoncelle, table et chevalet de violoncelle - Matériaux : bois, papier calque
•  Petits rabots de luthier - Matériaux : bronze

Anne Hoguet - Évantailliste - Année de promotion : 1998
L'Arbre Noir - Matériaux : "Brisé" plexi gravé

Philippe Nicolas - Graveur, Sculpteur sur pierre - Année de promotion : 2008
Paire de boucles d'oreilles - Matériaux : opale rose

Claude Delhief - Glypticien - Année de promotion : 1998
Tête de tigre + outils - Matériaux : Cristal de roche et nacre

> Vitrine 09 :

Philippe Nicolas - Graveur, Sculpteur sur pierre - Année de promotion : 2008
Boite réalisée dans un galet du Gard - Matériaux : galet

Christopher Clarke - Facteur d'instruments de musique anciens à clavier - Année de promotion : 2004
Ebauches, outils, gabarits, matières … - Matériaux : divers

Valérie Colas des Francs - Marqueteuse de paille - Elève de Lison de Caunes 
Boîte à sel, inspirée des arts décoratifs  - Matériaux : métal argenté marqueté de paille de seigle

Pierre Gaucher - Sculpteur - Année de promotion : 1996
Encrier tautologique - Matériaux : acier doux, acier inoxydable

Daniel Gontard - Fabricant de dorures - Année de promotion : 1995
•  Les flottes d’or - Matériaux : argent 990°/°°  doré  or 24 carats
•  Galon doré - Matériaux : Argent 900°/°° dorée or 24 carats + coton

Eric Seydoux - Sérigraphe d’art, Editeur d’artistes contemporains - Année de promotion : 2008
“Lithra” – 2007. Aliska Lahusen - Matériaux : Sérigraphie sur plomb.

> Vitrine 10 :

Valérie Colas des Francs - Marqueteuse de paille - Elève de Lison de Caunes 
Hélicoïde lumineux, évocation ludique de l’hélicoptère de Léonard de Vinci. - Matériaux : support de composition diverse, marqueté de paille de seigle

Eric Seydoux - Sérigraphe d’art, Editeur d’artistes contemporains - Année de promotion : 2008
“Job, avec... Cezanne”  Pierre Buraglio. 2006. - Matériaux :  impressions en sérigraphie sur divers supports,

Pietro Seminelli - Créateur textile, Art du pli - Année de promotion : 2006
« De la parure à l’armure – Réminiscences » Parure 4 - Matériaux : tissu graphité & plié.

> Vitrine 11 :

René Tazé - Imprimeur en taille-douce graveur - Année de promotion : 2006
Gravure en taille-douce - Matériaux : gravures imprimées sur papiers encadrées

Pierre Reverdy - Coutelier d'art en acier damassé - Année de promotion : 2004
•  Couteau « oosic d'argent - Matériaux : manche en os de morse fossilisé, lame en damas inox sandinox, garde et pommeau en argent ( cire directe)
•  Couteau brutal de forge - Matériaux : acier forgé

Jean-Marie Delhoume, - Maroquinier sur mesure - Promotion 2006
Speedy frame noir - Matériaux : Toile enduite aquarelle cuir ayers

 

Biographies de Maîtres d’art

 

Georges Alloro, Facteur d’instruments nouveaux - Promotion 2008

Le métier qu’exerce Georges Alloro n’existe dans aucune nomenclature. Il est à la croisée de la pratique de la musique, d’une formation technique de haut niveau, de la recherche et de l’innovation. Grâce à sa formation technique et sa maîtrise des métiers du bois, du métal, des cuirs, des matières synthétiques, des polymères, des vernis et des traitements de surface, Georges Alloro s’est tourné vers la création d’instruments nouveaux afin d’explorer d’autres espaces sonores. Georges Alloro est né le 11 mai 1946. Après son certificat d’études, il obtient un CAP d’artisan plombier, puis complète sa formation auprès de différents maîtres artisans des métiers du bois, des métaux et des matières synthétiques. Il actualise maintenant régulièrement ses connaissances et ses techniques sur les nouveaux matériaux et procédés, appliqués à la physique des sons et à la facture instrumentale. Georges Alloro est l’un des membres fondateurs du groupe « Horde catalytique pour la fin » (1968-1973), puis du groupe « Arthéa » (1974), pour lesquels il concevra un instrumentarium original regroupant une cinquantaine d’instruments nouveaux : cordes, vents, percussions, générateurs acoustiques de sons.

Il participe régulièrement, depuis 1974, à de nombreuses expositions, animations et concerts dans le cadre de l’association « Arthéa ». Il a également créé des instruments pour des artistes aussi différents que le batteur du groupe Scorpion (hardrock allemand), Ustad Mohiuddin Daggar, le grand maître de la tradition Dhrupad (Inde du Nord) ou Bruno Caillat (musique de la Renaissance). L’objectif majeur de cette transmission de savoir-faire entre le maître et son élève est de pérenniser et d’enrichir la profession avec cet esprit novateur qui est le sien.

 

Yves Benoit, Gaufreur, imprimeur et façonneur de velours - Promotion 2006

Fort d’un savoir-faire historique qui se transmet depuis le XVIIIe siècle, l’atelier Toscan crée des tissus pour la décoration de luxe. Il a pour spécialité les velours d’Amiens façonnés. Ses éditions textiles sont le fruit de recherches historiques et techniques, ses créations sont animées par la passion pour l’histoire des textiles d’art et l’héritage des manufactures royales d’Amiens. Issu du patrimoine historique régional, le savoir-faire de l’atelier est unique au monde ; l’atelier est le seul à le maîtriser et à l’exploiter. Chaque étoffe est soigneusement préparée à la main selon des procédés rares, du choix des couleurs aux façonnages d’art qui offrent d’infinies possibilités de création. Les façonnages les plus raffinés du velours sont rendus grâce à la technique des impressions en relief à la planche de cuivre. Ce sont les plus prestigieux. Les motifs y apparaissent, imprimés en relief auréolés d’un contour qui illumine le dessin.

Alexandre Bonvallet qui fut le créateur de ce procédé l’a développé en cachette, lors de la prohibition de l’impression (1686-1789) et fut autorisé à créer une manufacture royale en 1765, à Saint-Maurice-lès-Amiens. Ce velours fut baptisé « Velours Toscan » pour refléter toute sa richesse décorative et concurrencer les techniques génoises de tissage « jacquard » de velours à motifs.

Aujourd’hui, l’atelier réunit 120 planches d’époque qui étaient dispersées ; certaines ont été regravées et d’autres créées. La force du procédé tient au fait qu’il est possible de produire sur commande un mètre à la fois ou 100 mètres.

Par passion, Yves Benoît et son fils Germain ont entrepris de perpétuer la tradition du velours en ressuscitant cette technique qui « ennoblit le velours ». Ils en ont percé les secrets afin de renouveler et créer des couleurs, des décors nouveaux, rares et raffinés. En entreprenant des recherches sur les techniques et les styles d’autrefois, ils sont amenés à rééditer des modèles anciens mais aussi à en créer des modernes, imprimés en relief, sculptés, gaufrés, patinés, voire froissé, à utiliser des colorants d’origine naturelle, dont les pigments proviennent de la terre, de plantes exotiques ou locales, comme cette fameuse « waide » et son bleu inimitable qui en est issu. Chacune de leur recherche ou expérimentation demande cinq ans de travail avant d’être utilisée.

Après un baccalauréat D, une formation professionnelle d’ingénieur textile (spécialité chimie tinctoriale) et de nombreuses expériences de formation continue en façonnages, teintures, mais aussi en gestion, il effectue des stages à l’étranger. Une vraie curiosité pour les velours des manufactures royales amène Yves Benoît et son fils à travailler pour une clientèle prestigieuse et internationale. Leurs commandes correspondent pour moitié au marché ancien, et pour moitié au marché contemporain.

 

Luigi Bergamo, Fondeur de cloche - Promotion 1998

La fonderie de bronze de Luigi Bergamo est spécialisée dans la fonderie d’airain, un bronze très pur constitué à 78% de cuivre et à 22% d’étain, et destiné exclusivement à fondre cloches et battants.

Dotée de deux immenses fours séparés par une cheminée de vingt mètres, c’est en plein XIXe siècle que nous ramène la fonderie de cloches de Villedieu-les-Poëles, que visitent chaque année 80 000 touristes. La fonderie fonctionnait déjà il y a deux siècles d’abord sous le nom de Havard, puis Cornille-Havard ; Luigi Bergamo l’a rachetée et a relancé son activité il y a une quinzaine d’années. Là, ronronnent toujours les fours tandis que s’affairent pour la fonderie et l’art campanaire les vingt « compagnons » sur lesquels Luigi Bergamo règne en maître. Son oreille mais aussi sa formation d’ingénieur centralien et son don pour les mathématiques lui permettent d’« accorder le son » des cloches et d’en fabriquer tout le dispositif électrique. Un savoir devenu introuvable, dont dépend toute la beauté de ces carillons ou des envolées de cloches. Né en 1945, à Bolzano (Italie), Luigi Bergamo a quitté la ville tôt pour entreprendre un long périple à travers la France, qui le conduira en Normandie. Gageons que chacune des cloches, chacun des carillons, qui sort de sa fonderie saura égrener les heures du XXIe siècle en France comme à l’étranger, et que survivra ce magnifique vestige de l’industrialisation du XIXe siècle, puisque dès aujourd’hui son fils et sa belle-fille éprouvent à leur tour la même passion.

 

Christopher Clarke, Facteur d’instruments anciens à clavier - Promotion 2006

L’une des difficultés du métier réside dans le fait qu’un pianoforte, un clavicorde ou un clavecin ne sont pas seulement des outils à faire de la musique, ils sont aussi de magnifiques pièces de mobilier et des témoins historiques des idéaux sonores d’une époque. De ce fait, le facteur d’instruments d’époque se doit de participer à la recherche organologique et historique pour accomplir son métier avec la plus grande rigueur et la plus grande honnêteté.

Dans les ateliers de Christopher Clarke, on pense et on travaille le plus fidèlement possible, selon l’esprit, les règles et les outils de l’époque. Parfois même il faut recréer des outils pour mener à bien les tâches de fabrication d’autrefois. La même rigueur s’applique aux techniques et aux matériaux utilisés (ces derniers sont primordiaux pour la bonne sonorité d’un instrument).

La vocation de Christopher Clarke consiste à fabriquer des copies d’instruments anciens à clavier et réaliser des restaurations pour les plus grands solistes et les plus grands musées. Sa réputation internationale bâtie sur une grande exigence lui a valu le respect de ses pairs. Christopher Clarke est, plus que quiconque, convaincu que les meilleurs instruments du passé n’étaient pas inaboutis, comme on peut le dire, mais au contraire des véhicules entièrement adaptés aux exigences des musiciens d’alors et que ceux-ci trouvaient en eux les parfaits partenaires de leurs expressions artistiques. Ainsi, le lien entre le musicien et le facteur est-il déterminant dans la création des instruments d’hier et d’aujourd’hui.

Depuis sa licence en Sciences humaines à Edimbourg, Christopher Clarke a rencontré des personnes qui ont joué un rôle important dans sa formation aussi bien en Écosse, qu’en Allemagne ou en France. Ses réalisations d’instruments neufs, comme des clavicordes, des régales ou des pianoforte, sont nombreuses. Les collectionneurs privés et les musées font appel à lui régulièrement pour des restaurations majeures, en France, mais aussi en Angleterre, en Suisse, en Allemagne... La passion du métier, la remise en question permanente des acquis et l’amour du geste juste sont mis au service de la perfection de ces instruments d’autrefois pour que, sous les doigts des musiciens d’aujourd’hui, on entende, avec justesse, chanter encore les musiques du passé.

 

Patrice Cloud, Tourneur de porcelaine - Promotion 2008

Depuis 1740, la Manufacture d’abord royale, puis impériale avant de devenir nationale, s’emploie à maintenir vivants les savoir-faire inégalés qui font la qualité de sa production de porcelaine, en assurant leur valorisation, leur transmission de génération en génération, et en préservant le sens de la création qui, dès l’origine, a toujours déterminé la stratégie de l’institution. La Manufacture n’a jamais cessé, tout au long de son histoire, de s’associer aux meilleurs artistes de son temps. L’inventivité, la curiosité et les défis des artistes sont probablement, depuis plus de 250 ans, les moyens les plus sûrs de remplir ses missions. François Boucher fut l’un des premiers artistes invités au XVIIIe siècle ; aujourd’hui, il s’agit de Monique Frydman, d’Arman, de Johan Creten, de Fabrice Hyber, de Marie-Ange Guilleminot, d’Izhar Patkin, de Bertrand Lavier, de James Brown, de Pucci de Rossi, d’Elsa Sahal, de Vincent Barré, d’Éric Boulatov, de Françoise Quardon, de Myriam Méchita ou encore d’Ettore Sottsass, de Christian Biecher, de Rena Dumas, de Pierre Charpin, parmi bien d’autres... qui viennent exprimer à Sèvres, chacun à leur manière, le double enjeu de la tradition et de la modernité.

Patrice Cloud, céramiste d’art né en 1960 à Lagny (France), découvre les métiers de la céramique à l’âge de quinze ans. Il intègre le grand atelier de la Manufacture nationale de Sèvres en tant que tourneur, en 1977. Dès 1982, son talent créatif est salué puisqu’il obtient la médaille d’argent du concours des Meilleurs Ouvriers de France et, en 1987, la place d’honneur au concours européen Coffee cup avec son service « Eclat » en porcelaine de Sèvres. Il dessine un cendrier en 1990 et participe à de multiples expositions. Plus récemment encore, en 2004, sa cuillère « Eternel gourmand » reçoit le prix de la Fondation Bruckner au concours international de céramique de Carouge. Détenteur d’un savoir-faire exceptionnel en matière de céramique, il en connaît toutes les arcanes et maîtrise particulièrement le façonnage des pâtes toujours en usage à la Manufacture comme la pâte tendre. Il est aussi doué d’un réel talent de concepteur de formes, ainsi qu’en témoignent les pièces qu’il a conçues pour la Manufacture et qui font aujourd’hui pleinement partie du répertoire de ses éditions, illustrant ainsi la tradition de création interne de l’institution qui existe depuis le XVIIIe siècle et qui permet de mêler, sans difficulté aucune, le talent des artistes invités ponctuellement à celui des céramistes de la maison.

 

Roland Daraspe, Orfèvre - Promotion 2002

Repoussage, martelage, façonnage... qui décrivent la réalisation de pièces délicates et précieuses. L' orfèvre d'aujourd'hui travaille seul ; il est à la fois le concepteur et le réalisateur de chacune des étapes du métier. Les techniques mises en œuvre exigent une longue expérience mais également une certaine sensibilité artistique tant pour la mise en volume de la pièce que pour la qualité de ses matières et l’harmonisation des matériaux précieux.

Le parcours de Roland Daraspe est hors du commun. D’abord chaudronnier, mécanicien en aéronautique, puis verrier avec un artiste américain, il a ensuite découvert que la création, par le biais de l’orfèvrerie, lui permettait d’exprimer sa sensibilité de créateur. Au XVIIIe siècle, la ville de Bordeaux comptait plus de cinquante orfèvres. Mais aujourd’hui Roland Daraspe, riche de l’excellence et de la parfaite maîtrise des savoir-faire d’autrefois, est le seul à faire apposer le poinçon à tête de Minerve à la garantie de Bordeaux. Perpétuer la tradition tout en innovant, telle est la volonté de cet homme, dont les œuvres sont pensées, conceptualisées, dessinées avant d’être mises en forme. Son œuvre éblouit par les chatoiements d’une matière anoblie et surprend par un savant et astucieux mélange d’argent - son métal de prédilection – et de matériaux plus modernes. Roland Daraspe veut « donner une âme » à l’objet. Travaillant dans un premier temps l’orfèvrerie dite de main (objets personnels pour la poche), il se consacre ensuite à la recherche puis à la création de pièces plus exigeantes.

Son œuvre a été exposée à maintes reprises, notamment lors d’une conférence sur son travail au musée du Louvre. Le musée des Arts décoratifs de Paris, ceux de Bordeaux, de Lyon et le Fonds national d’art contemporain (FNAC) ont fait l’acquisition de pièces de sa création.

 

Lison de Caunes, Marqueteur de paille - Promotion 1998

Etonnante d’originalité, stupéfiante de finesse et de vivacité de coloris, la marqueterie de paille tient une place méconnue à côté de la marqueterie de bois. Moins centrée sur les meubles que celle-ci, elle était réservée traditionnellement aux objets utilitaires et raffinés de la maison (écritoires, coffrets, étuis…). Ce fut l’originalité du XXe siècle que d’en réhabiliter l’usage pour la création de paravents voire de revêtements muraux, en jouant avec les reflets de la lumière.

Petite fille du célèbre décorateur des années vingt André Groult, Lison de Caunes a vécu depuis sa plus tendre enfance entourée de ces objets magiques, qui vous enseignent le « beau ». Après des études de reliure et la découverte chez un antiquaire d’un meuble de marqueterie de paille elle découvre sa passion : retrouver et réhabiliter ces pratiques raffinées et poétiques qui, en particulier du XVIIe s siècle au XIXe siècle, furent si familières à ceux qui « avaient le temps » : religieuses, ou… forçats de nos bagnes, et même prisonniers des guerres napoléoniennes enfermés sur les pontons anglais. C’est à partir d’une matière première abondante et peu coûteuse, la paille de seigle, qu’ avec une patience infinie, ces « relégués » de la vie ont, au cours des siècles, créé des pièces magnifiques : étuis à binocles, boîtes à mouches, carnets de bals, mais aussi tableaux polychromes, coffrets aux multiples et ravissants tiroirs, meubles gracieux et colorés. Lison de Caunes nous fait aujourd’ hui redécouvrir ces merveilles et permettra demain d’en adapter les techniques aux objets contemporains voire aux revêtements muraux. Dès à présent Lison de Caunes a entrepris de former une nouvelle génération à cette discipline maintenant reconnue par les Meilleurs Ouvriers de France.

 

Claude Delhief, Glypticien - Promotion 1998

Glyptique, tiré de l’étrange et rugueux mot grec « gluptikos », évoque bien entendu la pierre mais ne s’applique qu’à l’art de la pierre de petit volume. Il est indissociable de mots tels que patience, minutie ou usure et englobe en un seul art tous ces travaux de touret qui usent, creusent, gravent la pierre, aussi minuscule soit-elle, comme des armoiries sur une bague, par exemple.

Elève, puis professeur de perspective aux Beaux-Arts, Claude Delhief se souvient avec gourmandise de ces dix années. Mais, il en reste persuadé, plus que les techniques apprises, ce sont les rencontres qui forment un homme, et plus encore un artiste. Élève de René Lalique et de François-Félicien Favrat, il savait que la pierre serait son univers. Fils et petit-fils de peintre, Claude Delhief a eu le privilège de côtoyer dès l’adolescence les plus grands, et si son « parrain » en art fut Paul Belmondo qui lui apprit la sculpture, André Derain et Maurice Vlaminck étaient également des proches de son père. Ensuite, Claude Delhief eut pour ami Giacometti et pour modèle Henry Moore. Nourri de ce savoir et de cette expérience, il déploie patience et douceur avec ses élèves, dans le travail quotidien de son atelier, suivant le modèle de ces très grands. « J’aime le contact avec les jeunes artistes. » dit-il. « Transmettre » est essentiel. Même si sa seule véritable « interlocutrice » reste la pierre. Graver, sculpter, polir, user, voilà ce que la nature lui a appris et il dit ne vouloir que l’imiter.

Comme la vague ou le vent il érode le minéral et le plie à sa volonté sans jamais ni le frapper, ni « l’enlever », à la manière du sculpteur. Sa création est là, qui à partir du dessin puis du modèle de cire réalisé, lui permettra de transcrire dans l’inaltérable ce que son art lui a inspiré. Portraits sur camée, travail de finesse, bijoux somptueux ou se marient la perle, l’or, les pierres précieuses et le diamant pour d’éblouissantes compositions, sculptures sur marbre de Carrare rehaussées de bronze poli ou mat, partout la virtuosité de Claude Delhief s’impose à nos yeux émerveillés.

 

Jean-Marie Delhoume, Maroquinier - Promotion 2006

Depuis 1854, dans le secret de ses ateliers, Louis Vuitton perpétue le tour de main du maroquinier. Les dernières techniques modernes ont rejoint les outils traditionnels. L’alêne au manche de buis est toujours utilisée pour perforer le cuir ; le couteau à parer amincit les bords ; le fil de lin et l’aiguille sont toujours à portée de main.

Le savoir-faire du maroquinier permet de réaliser sacs de ville, portefeuilles, porte-monnaie ou autres bagages. Pour découper la matière, remborder le cuir, coudre et assembler les différentes parties du sac, le geste doit être patient et précis afin que le produit soit parfait. Comme on embrasse une vocation, Jean-Marie Delhoume a très tôt choisi de se former au métier de maroquinier.

Il maîtrise l’ensemble des étapes de fabrication, de la découpe du cuir à la finition du produit. Curieux et inventif, humble face à la matière, Jean-Marie Delhoume a peaufiné son savoir-faire depuis de nombreuses années. Entré chez Louis Vuitton en 1976, il a fait ses premières armes à l’atelier historique d’Asnières, où ont été formés des compagnons malletiers, selliers et maroquiniers. Un peu plus tard, en relation avec des designers, Jean-Marie Delhoume apprend à interpréter les croquis et à fabriquer les prototypes de maroquinerie les plus complexes. Sacs en alligator rose ou mobilier de voyage en cuir naturel, bois de sycomore et acier, il réalise de nombreux modèles spectaculaires et perpétue aujourd’hui son métier à l’atelier de Saint-Pourçain-sur-Sioule. A chaque fois, il lui faut inventer de nouvelles techniques, repousser ses limites, avec la même ardeur.

Parce que le savoir-faire se transmet de génération en génération, Jean-Marie Delhoume forme aujourd’hui de jeunes apprentis et de nouveaux maroquiniers aux gestes du métier. Avec une générosité naturelle, il leur apprend à se libérer des contraintes techniques pour mieux inventer la maroquinerie de demain.

 

Nelly Saunier, Plumassière - Promotion 2008

Au XIIIe siècle, le plumassier était nommé « chapelier du paon » en 1581, on l’appelait le « plumassier de panache » ; en 1692, il est enfin reconnu sur la liste des métiers et devient « maitre panachier, plumassier, bouquetier et enjoliveur ». La durée de l’apprentissage était alors de six ans, suivis de quatre ans de compagnonnage. Au XVIIIe siècle, il commence à être concurrencé par la mode. Au XIXe siècle, Rose Bertin confectionnait les coiffures monumentales ornées de panaches de plumes pour Marie- Antoinette. En France, l’âge d’or de la plume se situe dans les années 1860 et 1870, pour atteindre son apogée au début du XXe siècle. En 1820, on comptait 51 plumassiers, puis 425 en 1929, pour tomber à 68 après la seconde guerre mondiale, ils ne sont plus aujourd’hui que quatre ou cinq.

Nelly Saunier est née le 8 mai 1964. Titulaire d’un CAP en plumasserie au lycée professionnel Octave Feuillet, puis d’un BTS designer textile à l’ENSAAMA Olivier de Serres, elle passe le concours de professeur en matériaux souples dans le cadre de la formation continue (PLP2). Elle assure la suppléance d’un professeur d’atelier en section « fleur » au lycée professionnel Octave Feuillet en 1988, puis enseigne les arts appliqués de 1991 à 1993, au lycée des Volettes à Rosay-en-Brie, ainsi qu’aux élèves en brevet professionnel broderie de 1994 à 1995. De 1996 à 2006, elle est intervenante à l’IFROA (Institut français de rénovation en œuvres d’art) en section art textile, autour de la pratique des techniques de la plume. Elle travaille indépendamment dans son atelier du XIVe arrondissement. Nelly Saunier collabore avec Jean-Paul Gaultier à huit collections, du prêt-à-porter à la haute couture, pendant dix-sept années d’une complicité prolifique.

Elle travaille également avec Olivier Theyskens pour Nina Ricci, Ricardo Tisci pour Givenchy, Jean-Charles de Castelbajac, Paco Rabanne, Jérôme Dreyfus ; elle réalise un cœur en plumes rouges pour les bijoux Chanel à l’occasion de la Saint Valentin, qui sera exposé dans les vitrines des boutiques de Paris, Tokyo, New York et Londres. Nelly Saunier participe à des expositions (« De la plume à la robe » à la SEMA) et des salons professionnels (Maison et Objet en 2001) ; elle sera « l’invitée d’honneur » du salon Première Classe en 2006 (salon international d’accessoires de mode).

 

Eric Seydoux, Sérigraphe - Promotion 2008

Développée après la seconde guerre mondiale, la sérigraphie est une technique relativement récente qui a connu un essor industriel fulgurant, puisque c’est la seule technique permettant d’imprimer sur tous supports. Du point de vue artistique, cette technique est un merveilleux moyen de créer des multiples ou de réaliser des œuvres uniques car toutes les audaces sont permises ; que ce soit au niveau des supports (papiers, cartons, métal, verre, plexiglas...) ou des rendus, la recherche industrielle ayant mis à la disposition de ce métier, des outils performants adaptés quasiment à toutes les situations.

Eric Seydoux est né le 23 juin 1946. Après avoir obtenu son baccalauréat en philosophie au lycée français de New York, il suit durant deux ans, des cours de peinture, de dessin et de lithographie à l’« Art Students League ».

A cette occasion, il travaille en atelier avec le peintre Dan Stacy, enseignant au MOMA (Museum of modern art) de New York. C’est seulement à l’âge de vingt et un ans qu’il apprend la sérigraphie à l’atelier Paris Arts (Ve arrondissement) régulièrement fréquenté par des artistes tels que Bernard Rancillac ou Peter Klasen. Il réalise lors de ces trois ans d’apprentissage des planches pour Jean Dubuffet. En 1974, il crée son propre atelier de sérigraphie d’art « l’Atelier » à Paris (dans le XIVe).

Son expérience et sa maîtrise l’amènent à l’enseignement : d’une part, de 1971 à 1979 à l’ENSAD (École nationale supérieure des arts décoratifs) et d’autre part, en tant que professeur de sérigraphie à l’école Estienne (Paris XIIIe). Éric Seydoux réalise de nombreux livres d’art ; notamment sur Jacques Monory avec le CNAP (Centre national des arts plastiques), ou sur Daniel Buren et Aimée Césaire pour les éditions du Solstice. Il réalise des impressions sur verre pour la Biennale de Venise et effectue régulièrement des travaux pour la galerie Yvon Lambert, le musée d’Art moderne de la ville de Paris, l’Arthotèque de Caen, le MAC/VAL à Vitry, le Festival d’Automne, l’Imprimerie Nationale, le musée Matisse, la galerie Franck. Il collabore avec les plus grands de la scène contemporaine artistique, parmi eux : Arman, Sophie Calle, Paul Delvaux, Jean Dubuffet, Gérard Garouste, Barbara Kruger, Nam June Paik, Bernard Rancillac.

Eric Seydoux participe à bon nombre d’ expositions en France et à l’étranger (FIAC, Art-Basel, SAGA, Art Paris), expose également dans son atelier galerie, chez Eric Dupont, chez Bernard Jordan et enfin chez Artcurial.

 

René Tazé, Imprimeur, pressier en taille douce - Promotion 2006

A partir de plaques de cuivre (zinc ou laiton), le taille-doucier met en œuvre des procédés d’impression de techniques de gravures en noir et blanc ou en couleur qui existent depuis le XVe siècle. Il en existe plusieurs tels que la gravure en eau-forte, au trait, à la pointe sèche, à la manière noire dite « à l’essui », l’utilisation du burin, et enfin les tirages couleurs, qui dépendent aussi de la technique employée. Les couleurs peuvent se juxtaposer ou se superposer, aller de l’aquatinte à la quadrichromie en utilisant plusieurs plaques et procéder ainsi à des « repérages pincés » ou « à l’aiguille ». L’artiste grave ou griffe le métal avec un burin ou une pointe sèche, ou se contente d’attaquer un vernis déposé sur le cuivre ; l’acide se charge de creuser les parties découvertes de la plaque. Le rôle des papiers, suivant leur épaisseur ou leur provenance est déterminant pour les effets recherchés.

René Tazé, depuis 1978, sert les artistes avec précision et minutie mais conserve une certaine liberté dans l’interprétation de la gravure, en accord avec les intéressés, lui laissant ainsi l’occasion de participer activement à la création de l’œuvre. Formé auprès de graveurs et d’artistes, il s’est toujours efforcé d’améliorer les techniques archaïques et d’être à l’écoute des artistes pour les conseiller et trouver des solutions aux problèmes posés. Il cherche et il invente depuis 1980, des applications pour des artistes tels que Desmazières, Jacobsen, Favier, Skira, Zao Wou-Ki, Titus Carmel, Boucraut, Garache, pour n’en citer que quelques uns. Chaque épreuve a valeur d’original et les essais peuvent durer quelques heures ou plusieurs semaines. Il s’inquiète du fait qu’il n’existe plus d’école de gravure, en dehors des ateliers privés et de certaines écoles des Beaux-Arts, pas plus d’ailleurs que d’apprentissage. Reconnu par ses pairs, il participe à des jurys, enseigne à l’École des beaux-arts de Saint-Étienne, travaille pour des galeries, une société de bibliophilie. Il a participé à plusieurs foires notamment « SAGA » où il est devenu un symbole pour la taille-douce. Une grande rétrospective a eu lieu en 2006 à la mairie du Xe arrondissement, intitulée « Morsure en page » (taille-douce et livres d’art). Elle a regroupé les livres d’art d’une vingtaine d’artistes de renom, depuis l’ouverture de l’atelier qui donne à voir l’éventail très large des techniques utilisées.

L’atelier TAZE s’est fait une excellente réputation dans les papiers Japon et Chine contrecollés, les papiers délicats et les fines aquatintes. Atelier dans lequel on « parle de brunissoir, de sucre, de roulette, de soie, de papier mouillé, de langes… ». Etre taille-doucier demande soin et exigence pour ce travail minutieux.

 

François Verzier, Tisseur artisanal de soieries - Promotion 1994

Redonnant vie, beauté et éclat aux sièges et tentures des magnifiques châteaux nationaux, cet art permet de reconstituer ou de restaurer des soieries, des brochés, des brocards, des damas et des velours ciselés dans la pure tradition française en recourant au tissage à bras chaque fois que nécessaire.

Né en 1930 à Lyon, François Verzier a toujours vécu dans l’univers de la soie. Il a repris et modernisé l’atelier familial datant du XVIIIe siècle, et s’est associé à une quarantaine de collaborateurs pour en faire une entreprise florissante qui trouve plus de la moitié de ses clients à l’étranger. De la restauration des appartements de Versailles en 1948 à ses débuts, jusqu’à la consécration aujourd’hui, François Verzier, jeune apprenti, a arpenté d’innombrables châteaux et musées qui peuvent revivre grâce à la beauté et aux couleurs de ses soieries. L’ordinateur est là maintenant pour faciliter la vie des dessinateurs, mais la « patte » du maître et son regard sont toujours irremplaçables. Aujourd’hui son fils prend la succession de l’entreprise Prelle. Un ou deux stagiaires accueillis chaque année, semblent assurer la relève de cet univers fait de grâce, d’élégance et de fragilité, que les splendeurs des châteaux d’Europe exigeront encore longtemps.

 

Reinhard von Nagel, Facteur de clavecin - Promotion 1994

Un temps délaissé, car pour certains trop lié aux plaisirs raffinés de l’Ancien Régime, le clavecin retrouve en cette fin de XXe siècle toute sa place au cœur des musiques baroques et classiques.

Pour Reinhard von Nagel, le clavecin est un langage. Un langage appris par les chemins de traverse où se croisent la pratique de l’aviron, de la natation, du droit, de l’édition, de la menuiserie, de la danse, de la musicologie... Jusqu’au jour où la rencontre avec Hubert Bédard puis avec William Dowd va transformer ce qui n’était alors qu’un vagabondage amoureux au gré des enthousiasmes, des envies, des plaisirs, en une passion et un métier. Ironie de l’histoire, c’est le facteur de clavecins Tobias Schmitt (un allemand !) qui « fabrique » la première guillotine au prix d’un « beau clavecin », au moment même où la fureur révolutionnaire voue cet instrument, assimilé à l’aristocratie elle-même, à la destruction et à l’oubli.

L’éclipse durera jusqu’à ce que William Dowd fasse revivre la facture historique pervertie par les fabricants de piano au début du XXe siècle et rende au clavecin la légèreté de son toucher ainsi que son timbre original ouvrant la voie au renouveau de la musique baroque. C’est dans cet élan que Reinhard von Nagel monte son atelier et, grâce à la science de William Dowd avec qui il s’associe, passe d’amateur éclairé à professionnel averti, puis à maître d’art. L’atelier est une entité, un instrument, un outil dont Reinhard von Nagel est l’infatigable animateur qui invite Gustav Leonhardt, Scott Ross, William Christie, Olivier Baumont, Don Angle et tant d’autres à donner un « concert dans les copeaux ». Il pousse Marc Chagall,Olivier Debré, Pierre Alechinsky à décorer des instruments et accueille, au milieu des établis, une représentation du Neveu de Rameau, clin d’œil malicieux au fameux clavecin de Diderot. Loin de la copie ou de la reconstitution mortifère, mais en tenant compte des besoins modernes des interprètes, Reinhard von Nagel crée des pièces uniques pourtant fidèles à la tradition d’un

Blanchet ou d’un Ruckers. Il restaure aussi des instruments anciens, entretenant avec eux force conversations secrètes, pour apprendre de leurs blessures leur histoire, et celle de l’histoire de la musique. L’instrument se fait mémoire, et Reinhard von Nagel donne à cette mémoire une forme et une voix.

 

Pietro Seminelli, Créateur textile, art du pli - Promotion 2006

Le savoir-faire du plieur participe d’une connaissance pointue de la géométrie et de ses règles de construction, et de l’observation fidèle des modèles naturels. L’« origami », art du pli au Japon, en est une illustration ludique, bien que ses origines soient religieuses. Le pli était utilisé pour des rituels d’offrande aux divinités chez les shintoïstes. Le plieur s’exprime au travers de «plis montagne» et de « plis vallée », en adaptant des trames géométriques aux tracés rigoureux, souvent complexes, permettant de transformer une surface en une architecture allant jusqu’au volume. Pour ce faire, un diagramme est imprimé à l’aide d’outils de marquage sur la surface, tantôt textile, tantôt papier, rainant la matière et la préparant à l’étape du pliage.

Ces outils, principalement des plioirs en os, en corne ou en acier, seront choisis en fonction de la finesse et de la fragilité des supports utilisés. Règles, équerres, compas, épingles, restent à ce jour, les principaux instruments nécessaires à la construction des diagrammes. Le pliage, quant à lui, est une succession de gestes élémentaires. La vision tridimensionnelle est essentielle dans l’interprétation des trames géométriques. L’étape finale est celle de la couture qui fixera ces savantes superpositions, pour en permettre l’application dans des domaines aussi variés que la haute couture, la décoration, l’art du costume et la sculpture. Pietro Seminelli, maître en la matière, utilise cette écriture unique, dans chacune de ses réalisations. Il explore ce langage grâce à la délicatesse des étoffes diaphanes.

Né en 1968, diplomé de l’École nationale supérieure des arts appliqués et des métiers d’art (ENSAAMA), récompensé du grand prix des Métiers d’art pour l’année 2000, Pietro Seminelli a révélé son talent au cours de diverses collaborations avec des architectes, des décorateurs et de grands couturiers. Il a par ailleurs participé à de nombreux salons professionnels haut de gamme, et expose ponctuellement ses oeuvres dans des galeries d’art en France tout comme à l’étranger.

Avec l’exposition sur « le pli » au musée des beaux-arts de Roubaix-Tourcoing en 2002, il affirme sa recherche artistique et introspective.

L’atelier, situé dans le Calvados, est un lieu retiré du public, où il développe des projets pour le monde entier, avec l'aide de deux collaboratrices. Au fil des ans, cette technique est devenue une spécificité de son atelier :le pli appliqué au travail de la transparence dans le traitement de l’espace intérieur.

Un parcours atypique, nourri d’expériences dans divers domaines : la haute couture, la publicité, le théâtre. Le développement de son activité actuelle, dont il est l’unique représentant, s’appuie sur un savoir-faire exceptionnel, qui prend sa force dans la connaissance de la géométrie, du geste précis et dans la continuité d’une tradition du plissé, revisitée.