De 1934 à 1939, au tout début de sa carrière, Robert Doisneau fut salarié chez Renault au sein du service photographique de l’entreprise. De cette période d’apprentissage, une prodigieuse collection a vu le jour. Tantôt photographe baladeur, se déplaçant d’atelier en atelier pour témoigner de la vie de l’entreprise, tantôt chargé de couvrir les concours d’élégance ou de réaliser des prises de vue publicitaires, Robert Doisneau a laissé un fonds d’une grande richesse et d’une grande variété où son inspiration humaniste et sincère transparaît à chaque image. Après des études de graveur lithographe, Robert Doisneau se découvre vite une passion pour l’image photographique. En 1931, il devient l’assistant dusculpteur et peintre André Vigneau qui lui révèle une nouvelle perception del’image, dans l’esprit du Bauhaus. En 1932, la revue Excelsior publie son premier reportage personnel sur le marché aux puces de Saint-Ouen. En 1934, à son retour du service militaire, il entre au service photo de Renault. Alors que la crise économique sévit et qu’il vient de se marier, cet emploi est une chance pour le jeune photographe : très vite, cette chance va aussi devenir une source d'inspiration majeure. Ce service, qui s’organise progressivement, comporte trois photographes « baladeurs » qui ont pour principale mission de témoigner de la vie de l’entreprise. Ainsi, Doisneau se perfectionne en photographie avec un lourd appareil 18 x 24. Il prend de nombreuses vues à l’intérieur de l’usine (chaînes de montages, machines imposantes, presses et fonderies…) en jouant avec les lumières et les perspectives pour produire des photographies très structurées. Progressivement, il apprend à surmonter sa timidité et se découvre des affinités avec les ouvriers pour lesquels il éprouvera toute sa vie une tendresse respectueuse. Le plus bel hommage qu'il leur rend est une formidable série de portraits qui préfigurent déjà son œuvre d'après-guerre. L’autre partie de son travail consiste à fournir des photographies de prestige et des photographies publicitaires pour les brochures et les journaux. Chez Renault, toutes les photos sont alors exécutées avec les seules ressources de l’usine, pas question d’employer des modèles professionnels. Cette contrainte nécessite de développer l’art de la mise en scène, en témoigne par exemple le « Déjeuner sur l’herbe ». Outre les photos publicitaires, Doisneau est régulièrement chargé de "couvrir" les concours d’élégance, où luxe et insouciance sont à l'honneur. Les photographies issues de ces reportages valorisent les splendides voitures, Reinastella ou Vivastella, qui font la renommée de Renault dans les années 1930. Au début de 1939, le marché de la photo d’illustration se développe et les journaux lui accordent une place croissante. Doisneau pense de plus en plus à prendre son indépendance. Ce qu'il fait finalement en juillet de la même année, après avoir quitté Renault. C'est le début d'une carrière qui en fera un des photographes les plus connus au monde. Prix Kodak en 1949, Prix Niepce en 1956 et Grand Prix de la Photographie en 1983, il est invité à participer à d’importantes expositions internationales. En 1951, Doisneau retourne chez Renault pour prendre quelques photographies destinées à illustrer un ouvrage collectif sur l’usine d’automobiles nationalisée intitulé l’Automobile de France. En 1954 et 1956, il réalisera également quelques reportages publicitaires pour la Frégate et la Dauphine. Robert Doisneau est décédé en 1994. Du 17 janvier au 21 mars 2004, L’Atelier Renault (53, avenue des Champs Elysées, 75008 Paris), propose au grand public une occasion unique de découvrir une facette méconnue de l’œuvre de Robert Doisneau à travers l’exposition « Le Renault de Doisneau ».