12/06/14

De Louis XIV à Louis XVI. Un art de vivre à la française - Musée du Louvre, Nouvelles salles des objets d'art

De Louis XIV à Louis XVI. Un art de vivre à la française Musée du Louvre, Nouvelles salles des objets d'art

Au premier étage de l’aile nord et dans une partie de l’aile ouest de la cour Carrée, un chantier d’exception s’est achèvé : celui de la rénovation complète des salles consacrées aux objets d’art du règne de Louis XIV et du XVIIIe siècle. Il constitue la dernière étape des travaux du département des Objets d’art entrepris dans le cadre du projet du Grand Louvre. 

Le musée du Louvre abrite l’un des ensembles les plus riches et les plus complets jamais réunis dans une collection publique, témoignage éclatant du savoir-faire français du XVIIIe siècle, admiré dans le monde entier. Afin de donner aux visiteurs du musée une lecture plus compréhensible de cette collection, les salles ont connu un changement spectaculaire.

Une collection unique 

Les collections de l’art du XVIIIe du département des Objets d’art offrent un large panorama de la décoration intérieure, de la production des grandes manufactures, de l'artisanat et du commerce d'art, principalement français, du règne de Louis XIV à la Révolution. Elles sont constituées de boiseries et de décors peints, de tapisseries et de tapis, de meubles d'ébénisterie et de menuiserie, de bronzes d'ameublement, de marbres et pierres dures, d’orfèvrerie et de bijouterie, d’instruments scientifiques, de faïences et porcelaines européennes, de laques et porcelaines d'importation. L'origine principalement royale et princière de ces collections leur confère un caractère particulièrement remarquable, en comparaison de celles des autres musées d’arts décoratifs, en Europe et aux Etats-Unis. 

Les arts somptuaires des règnes de Louis XIV, Louis XV et Louis XVI n’ont pourtant acquis droit de cité au musée du Louvre que tardivement, à l’occasion de deux moments-clés. En 1870, lors du sauvetage in extremis de meubles et d’objets historiques retirés du palais des Tuileries et du château de Saint-Cloud avant qu’ils ne soient la proie des flammes. Puis, en 1901, lors d’un versement par le Mobilier national d’un grand nombre de chefs-d’œuvre de l’ébénisterie et de la tapisserie parisienne provenant des demeures royales et impériales. 

La générosité de très grands amateurs, tels qu’Isaac de Camondo ou Basile de Schlichting, à l’origine de legs fastueux, respectivement en 1911 et 1914, contribua à enrichir la collection au début du XXe siècle. Les enrichissements se sont poursuivis depuis de manière spectaculaire, permettant au Louvre de rassembler une des premières collections au monde. 

Un nouveau parcours muséographique

Les salles du premier étage de l’aile nord de la cour Carrée, dont l’installation remontait pour l’essentiel au début des années 1960, ont été fermées dès 2005 pour une nécessaire mise aux normes. Celle-ci impliquait, entre autres, l’établissement d’escaliers de part et d’autre du pavillon Marengo. Par ailleurs, la muséographie en place jusqu’en 2004 était encore, avec quelques aménagements plus récents, celle voulue par Pierre Verlet en 1962-1966.

A l’automne 2011 ont débuté les travaux de rénovation. La maîtrise d’oeuvre du chantier a été confiée à l’architecte Michel Goutal, suivant un projet muséographique élaboré de concert par Jacques Garcia et les conservateurs du département des Objets d’art, sous la direction de Marc Bascou, et avec l’assistance technique de la direction de la Maîtrise d’Ouvrage du musée du Louvre.

Les visiteurs peuvent ainsi maintenant découvrir un nouveau parcours muséographique de 2183 m2, comportant 33 salles et présentant plus de 2 000 objets.

Le circuit est divisé en trois grandes séquences chronologiques et stylistiques :
- 1660-1725 : règne personnel de Louis XIV et la Régence
- 1725-1755 : épanouissement du style rocaille
- 1755-1790 : retour au classicisme et règne de Louis XVI.

Les créations du Grand Siècle seront présentées dans les salles historiques du Conseil d’Etat, tandis que l’aile nord de la cour Carrée accueille une suite de period rooms, doublées de galeries de vitrines thématiques. Les premières permettent de remettre les oeuvres en contexte, les secondes de présenter les collections de céramique et d’orfèvrerie et de mettre en valeur des grands chefs d’oeuvre de la période.

La présentation essentiellement chronologique des collections a vocation à éclairer aussi bien l'histoire des techniques que celle des styles, à présenter les grandes résidences et les principales personnalités du temps : artisans, artistes ou commanditaires. A travers l'évocation des palais royaux ou princiers disparus (Saint-Cloud, Bellevue, les Tuileries, Montreuil, ...), des hôtels particuliers parisiens (hôtels Le Bas de Montargis, Dangé, de Chevreuse) et des résidences de campagne des élites (châteaux de Voré et d'Abondant), c'est toute la variété des lieux et des milieux à l'origine de la floraison des arts décoratifs des XVIIe et XVIIIe siècles, qui fonde l'arrière-plan historique de la présentation.

On y croise la famille royale (le Roi, le prince de Condé, le comte d'Artois, Mesdames de France, Marie-Antoinette), mais aussi les favorites (Madame de Pompadour, Madame du Barry), des grands seigneurs de la cour (le duc de Chevreuse, le marquis de Sourches) et des financiers parisiens (Claude Le Bas de Montargis, François-Balthazar Dangé).

La collection rend bien sûr hommages aux grands créateurs des arts décoratifs de cette période, dont on mesure mal aujourd’hui, pour certains, l’immense prestige dans toute l’Europe du temps : les ébénistes André-Charles Boulle, Charles Cressent, Bernard II Van Risenburgh, Jean-François Oeben, Martin Carlin, Jean-Henri Riesener, les orfèvres Thomas et François-Thomas Germain, les Roëttiers, Robert-Joseph Auguste, les peintres et décorateurs Charles Le Brun, Jean-Baptiste Oudry, Charles-Antoine Coypel. Les plus fameux sont logés à la Galerie du Louvre et forment, à l’instar d’André-Charles Boulle ou de Thomas Germain, des dynasties aussi renommées que durables. 

Véritables laboratoires d’invention, leurs ateliers travaillent autant pour le roi et la cour que pour les souverains étrangers, contribuant à cette diffusion de la culture française qui donne le ton à toutes les cours européennes. 

Un programme de médiation permet en outre l’intégration par des panneaux de contextualisation et des équipements multimédia, de références historiques ou sociologiques éclairant aussi bien l’histoire du goût que le monde de la production, celui des intermédiaires et marchands ou l’évolution de la commande et des usages. 

La découverte d’un art de vivre à la française : le choix des period rooms   

Au sein de chaque séquence, une attention particulière est portée à l’aménagement de period rooms, s’efforçant de rétablir des décors dans leur configuration originale. D’autres salles regrouperont dans des « évocations d’intérieur » des ensembles stylistiquement cohérents de mobilier et d’objets d’art au sein de décors recréés. Ce principe muséographique des period rooms, adopté dès le XIXe siècle par certains musées historiques ou d’arts décoratifs, permet de répondre aux attentes d’un large public, en rendant perceptible et compréhensible cet art de vivre luxueux, au raffinement inégalé, et en resituant les plus belles inventions des décorateurs et maîtres-artisans dans leur environnement naturel. 

Les period rooms ainsi réalisées permettent de restituer des décors documentés, accompagnés de meubles d’époque, comme les salons et bibliothèque de l’hôtel de Villemaré, le grand salon du château d’Abondant et la chambre de parade de l’hôtel de Chevreuse. 

En concertation avec les autres départements, sont présentés des peintures, des sculptures antiques ou modernes, des pastels et des estampes dans des installations pérennes ou des accrochages renouvelables. Le célèbre portrait de Louis XIV par Hyacinthe Rigaud est ainsi exposé dans l’une des salles du Conseil d’Etat, où est réunie l’une des plus belles collections de meubles Boulle au monde. 

La nouvelle muséographie permet notamment d’installer d’importants décors peints, comme les panneaux d’Oudry du château de Voré ou un plafond provenant du palais Pisani à Venise, attribué à Giovanni Scajario (1726-1792). Le pavillon Marengo accueillera une extraordinaire coupole peinte par Antoine-François Callet (1741-1823) pour l’hôtel de Bourbon Condé. 

Un chantier entièrement financé par le mécénat

Cette rénovation, d’un budget de 26 millions d’euros, est le premier grand projet muséographique entièrement financé grâce au mécénat. Elle a bénéficié du soutien de nombreux partenaires au premier rang desquels l’entreprise Montres Breguet, mécène principal du projet, et le Cercle Cressent du Louvre, présidé par Maryvonne Pinault, qui réunit amateurs et collectionneurs d’Objets d’art du XVIIIe siècle. 

En France et aux Etats-Unis, la Société des Amis du Louvre et les American Friends of the Louvre ont mobilisé de nombreux donateurs autour de ce projet. D’autres grands partenaires français et étrangers se sont engagés aux côtés du Louvre, en particulier MGM China, Eni, Kinoshita Group, la Fondation Stavros Niarchos, la Fondation Gilbert et Rosemary Chagoury et les Fondations Edmond de Rothschild. Enfin, deux collaborations d’envergure menées avec des musées américains, le High Museum d’Atlanta et les Fine Arts Museums de San Francisco, ont contribué au financement du réaménagement. 

Musée du Louvre