Cristina Iglesias
Musée de Grenoble
23 avril - 31 juillet 2016
Singulier, fascinant et beau, tel apparaît l’univers de Cristina Iglesias. Considérée comme une des artistes espagnoles les plus marquantes de ces vingt-cinq dernières années dans le domaine de la sculpture, reconnue au plan international, notamment grâce à plusieurs commandes monumentales, elle reste peu connue du public français. L’exposition du musée de Grenoble constitue donc une belle opportunité de découvrir cette œuvre, à la fois pleinement contemporaine et profondément ancrée dans la culture ibérique.
Née en 1956 à San Sebastian, Cristina Iglesias s’est fait connaître sur la scène artistique européenne au milieu des années 1980. Son travail s’appuie depuis ses débuts sur des formes fortement architecturées qui se présentent comme autant d’invitations à des expériences sensorielles particulières. Il est avant tout ques- tion d’espace dans ses œuvres. Des espaces auxquels on se confronte, que l’on côtoie, que l’on pénètre. Ils peuvent évoquer tant la nature que l’architecture, les deux se confondant souvent dans des constructions hybrides, réalisées avec les matériaux les plus divers, du bronze à l’albâtre en passant par le béton et le verre. Œuvre ambiguë, où le paradoxe se mêle au faux-sem- blant, elle constitue une exploration vertigineuse d’un univers parallèle, onirique, où le réel ne se départit jamais du fantasme, où la vérité est double, claire et obscure, douce et cruelle.
Pour le musée de Grenoble, Cristina Iglesias a conçu un parcours, à partir d’un ensemble de travaux réalisés ces quinze dernières années, qui devrait permettre de saisir les enjeux de son œuvre tout en se familiarisant avec l’étrange poésie qui en émane.
En guise d’introduction, plusieurs salles seront ainsi consacrées à la présentation de travaux sur papier, de maquettes, de séri- graphies sur acier qui viendront éclairer les différents modes de travail de l’artiste de même qu’un certain nombre de projets monumentaux, réalisés ou non… L’exposition se poursuivra avec des œuvres de grands formats, qui conduiront le visiteur au cœur même de l’univers de Cristina Iglesias. Ici la vue, mais aussi le toucher, l’odorat ou encore l’ouïe sont convoqués pour vivre littéralement ces sculptures aux apparences d’architectures. On découvrira notamment un Passage suspendu, constitué de nattes en paille tressée, sous lequel on déambule et qui découpe la lumière en mille éclats. Plus loin s’ouvrira un espace végétal, véritable labyrinthe dont les parois sont animées par un lacis de branches et de feuilles, telle une forêt pétrifée de bronze, obscure et inquiétante. Plus avant encore, un ensemble de « jalousies », à la fois écrans et paravents de bois ou de métal, se déploiera dans un vaste espace pour former comme autant de cellules, lieux d’entre-deux clos et ouverts, silencieux et bruis- sants de mots…
Univers hybride, où la douleur est contenue et la sensualité affeure dans chaque forme, le monde de Cristina Iglesias est fait de suggestions et de secrets. Intriguer, laisser deviner sont les ressorts de ses dispositifs sculpturaux dont la visée semble être, en défnitive, une manière d’initiation voluptueuse et inquiète des sens à une réalité intermédiaire, à la fois concrète et rêvée, physique et intellectuelle, pure et pervertie.
Guy Tosatto, conservateur en chef, directeur du musée de Grenoble
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Musée de Grenoble
5, place de Lavalette 38000 Grenoble