21/09/16

Hodler Monet Munch @ Musée Marmottan Monet, Paris : Peindre l'impossible

Hodler Monet Munch. Peindre l’impossible
Musée Marmottan Monet, Paris

Jusqu'au 22 janvier 2017


Ferdinand Hodler
Ferdinand Hodler
La Femme courageuse, 1886
Huile sur toile, 98,9 x 171 cm
Bâle, Kunstmuseum
© Kunstmuseum Basel, Martin P. Bühler

 

Ferdinand Hodler
Le Lac de Thoune et la chaîne du Stockhorn, 1904
Huile sur toile, 71 x 105 cm
Collection Christoph Blocher

Pourquoi réunir le temps d’une exposition Ferdinand Hodler, Claude Monet et Edvard Munch ? Un Français né en 1840 et mort en 1926, un Suisse né en 1853 et mort en 1918 et un Norvégien né en 1863 et mort en 1944 : la composition du trio peut paraître étrange. Ils ne se sont même pas rencontrés, et, s’il ne fait aucun doute qu’Hodler et Munch ont souvent regardé Monet, la réciproque n’est  pas démontrée. Circonstance aggravante : l’histoire de l’art a pris l’habitude de les classer dans des catégories différentes, impressionnisme, postimpressionnisme ou symbolisme. Or c’est ce classement que cette exposition se propose de remettre en cause en montrant que leurs oeuvres ont bien plus à se dire entre elles qu’on ne le croirait.


Claude Monet
Claude Monet
Impression, soleil levant, 1872
Paris, Musée Marmottan Monet
© Christian Baraja


Claude Monet
Claude Monet
La Débâcle à Vétheuil, 1880
Huile sur toile, 60 x 100 cm
Madrid, Museo Thyssen-Bornemisza
© Museo Thyssen-Bornemisza, Madrid

Une évidence historique d’abord : ces peintres sont des contemporains, bien qu’ils appartiennent à des générations différentes. Ils vivent dans le même monde en cours de mutation, l’Europe d’avant et d’après la Première Guerre Mondiale. Ils en éprouvent les mutations techniques, politiques et sociales. Celles-ci affectent leur mode de vie et leurs pratiques artistiques. Ainsi tous trois sont-ils  des voyageurs et découvrent des lieux et des motifs auxquels, un demi-siècle plus tôt, ils n’auraient pu accéder. Monet se rend en Norvège, Hodler monte jusqu’aux glaciers alpins, Munch va et vient du nord au sud de l’Europe. Ainsi sont-ils aussi les contemporains du développement accéléré des sciences physiques et naturelles qui procèdent par expérimentations et séries – modèles que  tous trois, à des degrés divers, introduisent dans leur processus créatif.

Edvard Munch
Edvard Munch
La Pluie, 1902
Huile sur toile, 86,5 x 115,5 cm
Oslo, Nasjonalmuseet for kunst, arkitektur og design / Photo © Børre Høstland


Edward Munch
Edvard Munch
Le Soleil, 1912
Huile sur toile, 123 x 176,5 cm
Oslo, Munchmuseet
Photo © Munch Museum

Ces expérimentations, ces séries, c’est-à-dire une conception méthodique, tous trois la mettent en oeuvre pour affronter les difficultés de la représentation de motifs qui, en raison même de leurs particularités, deviennent pour eux des obsessions. « J’ai repris encore des choses impossibles à faire : de l’eau avec de l’herbe qui ondule dans le fond… c’est admirable à voir, mais c’est à rendre  fou de vouloir faire ça. » Ces mots sont de Monet, mais ils pourraient être ceux du peintre qui, jusqu’à sa mort, s’obstine à étudier l’horizon des Alpes depuis sa fenêtre, de l’aube au crépuscule – Hodler. Ou de celui qui, insatisfait, revient jusqu’à la dépression sur les mêmes motifs, une maison rouge, des marins dans la neige, le couchant regardé en face, la nuit boréale – Munch. Comment  peindre de face l’éclat éblouissant du soleil, avec de simples couleurs à l’huile sur une simple toile ? Comment peindre la neige dont l’éclat et la blancheur ne cessent de varier à la moindre nuance de la lumière ? Comment suggérer les mouvements et variations de la lumière sur l’eau, malgré l’immobilité de la peinture ? Tous trois mettent ainsi la peinture à l’épreuve de l’impossible.

L’exposition les suit pas à pas dans ces recherches en comparant sans cesse leurs tentatives, en organisant des confrontations visuelles entre les trois artistes dans un espace repensé pour l’occasion afin d’accueillir une vingtaine d’oeuvre de chacun. Les sujets, c’est-à-dire les problèmes : haute montagne, soleil, neige, eau vive. Le parcours les réunit une dernière fois sous le signe de la  couleur dégagée du devoir d’imitation, jusqu’à leurs oeuvres ultimes, elliptiques et libres – si libres qu’elles n’ont guère été comprises de leurs contemporains. Grâce à partenariat exceptionnel entre le Munchmuseet d’Oslo et musée Marmottan Monet, elle présente des oeuvres du peintre norvégien qui, pour certaines, n’ont jamais été vues à Paris. La générosité de plusieurs collections privées  suisses permet d’y réunir un ensemble Hodler non moins exceptionnel, que ce soit par sa qualité ou sa rareté.

Commissaire de l'exposition : Philippe Dagen

MUSEE MARMOTTAN MONET
www.marmottan.fr