Edition Limitée
Vollard, Petiet et l’estampe de maîtres
Petit Palais, Paris
Jusqu’au 29 août 2021
Le Petit Palais explore avec cette exposition inédite l’activité d’éditeur d’estampes et de livres illustrés de l’emblématique marchand d’art Ambroise Vollard. Vollard travailla avec les plus grands artistes de son temps : Picasso, Bonnard, Cassatt, Chagall, Maillol, Redon, Rouault et tant d’autres. Passionné par l’édition, il y a investi l’essentiel de sa fortune tirée de la vente des toiles des maîtres modernes et hissa cette activité à un niveau d’exigence jamais vu jusqu’alors. Bénéficiaire de nombreux dons et legs de Vollard lui‑même et de ses héritiers, le Petit Palais a choisi de mettre en valeur cet ensemble exceptionnel d’estampes, livres illustrés et objets d’édition (bronzes et céramiques), enrichi de nombreux prêts d’autres institutions et collections. L’exposition est l’occasion d’évoquer également la personnalité d’Henri Marie Petiet, successeur de Vollard et figure majeure du commerce de l’estampe d’après-guerre. L’exposition rend donc un double hommage au rôle de ces deux marchands et éditeurs d’art.
La carrière de marchand d’Ambroise Vollard (1866-1939) le situe comme une figure essentielle du commerce de l’art au tournant des XIXe et XXe siècles, entre Paul Durand-Ruel et Daniel-Henry Kahnweiler. C’est lui qui promeut Cézanne, Gauguin et qui ouvre sa galerie au jeune Picasso.
En plus de ses activités de marchand de tableaux, il se lance avec passion dans l’édition d’estampes dès 1894 en rééditant la Suite Volpini de Gauguin. Mais l’aventure débute réellement lorsqu’il réalise les deux fameux Album des peintres-graveurs (1896 et 1897), qui réunissent les planches de maîtres comme Fantin-Latour, Puvis de Chavannes, ou de jeunes artistes qui incarnent une nouvelle modernité comme les Nabis, dans le sillage de Redon. Ambroise Vollard diffuse les oeuvres de Mary Cassatt mais édite aussi la fameuse suite des Saltimbanques de Picasso ainsi que des albums individuels de Bonnard, Vuillard et Denis en misant sur le même principe de l’édition d’estampes d’artistes à tirage limité.
En parallèle, il développe une activité d’éditeur de livres d’artiste. Il s’y investit entièrement, tant financièrement que personnellement. Il lui faut pourtant attendre les années 1920 et surtout 1930 pour voir les ventes se multiplier et un engouement se créer autour de ses éditions. Son perfectionnisme le conduit à sélectionner et à commander lui-même les papiers et les caractères d’imprimerie. Vollard prend ainsi un rôle de créateur à part entière, en coordonnant tous les acteurs d’une aventure éditoriale titanesque.
Dès ses premières éditions, notamment son magistral Parallèlement de Verlaine illustré par Bonnard (1900), Vollard choque les bibliophiles par ses partis pris, et surtout par son affection pour la lithographie en couleurs. Sa réputation est faite. Suivront de nombreuses réalisations d’envergure, comme Le Jardin des supplices (illustrations de Rodin, 1902), Sagesse (Maurice Denis, 1911), Les Fleurs du mal (Émile Bernard, 1916), Le Chef-d’oeuvre inconnu (Picasso, 1931) ou encore Passion (Rouault, 1939). Son influence auprès des artistes est telle qu’il encourage les peintres à s’intéresser parfois durablement à l’estampe bien sûr, mais aussi à s’essayer à la peinture sur céramique ou encore à la sculpture, comme c’est le cas pour Maillol.
En 1939, il décède brutalement dans un accident de voiture. Henri Marie Petiet (1894-1980), qui se fourni auprès de Vollard depuis les années 1920, rachète l’essentiel de son stock d’estampes, dont la fameuse Suite Vollard de Picasso, dont il va assurer la diffusion. Il s’impose d’emblée comme son successeur en tant que marchand d’estampes, mais aussi comme passeur de la modernité française à l’étranger et notamment aux États-Unis. Henri Petiet édite lui-même certains créateurs qui ont travaillé avec Vollard, comme Maillol ou Derain, et se lance à son tour dans l’édition d’un livre d’artiste, Les Contrerimes de Toulet illustré par Jean-Émile Laboureur, son graveur fétiche. Enfin, il soutient de nouveaux artistes comme Marie Laurencin, Marcel Gromaire ou encore Edouard Goerg qui le présente comme le « plus Vollard des marchands ».
La médiation de l’exposition permet de mieux comprendre les techniques de l’estampe et de l’imprimerie avec notamment la présentation d’outils et d’une presse taille-douce prêtée par l’Imprimerie nationale et activée lors de démonstrations. Enfin, un parcours dédié à l’exposition est disponible en téléchargeant l’application de visite du Petit Palais lancée au même moment que l’exposition. L’application, dont le contenu est également disponible sur le visioguide du musée, offre une visite guidée très vivante de l’exposition à travers quelques oeuvres clés et grâce aux propres anecdotes de Vollard et de Petiet, dont les personnalités atypiques et attachantes seront ainsi mises en valeur. Il y a en outre un mini-site ludique permettant de composer une page d’édition avec des typographies et des motifs ornementaux.
CATALOGUE DE L’EXPOSITION
Vollard, Petiet et l’estampe de maîtres
Éditions Paris Musées
160 pages, 150 illustrations, 29 euros
Commissariat de l'exposition : CLARA ROCA, conservatrice des arts graphiques et photographies des XIXe et XXe siècles au Petit Palais.
PETIT PALAIS
Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris