Mondrian Evolution
Fondation Beyeler, Riehen / Bâle
5 juin – 9 octobre 2022
Kunstsammlung Nordrhein-Westfalen, Düsseldorf
29 octobre 2022 – 12 février 2023
À l’occasion du 150ème anniversaire de la naissance de l’artiste, la Fondation Beyeler consacre une grande exposition au peintre néerlandais PIET MONDRIAN (1872–1944), réunissant des œuvres de sa propre collection et d’importants prêts internationaux. Figurant parmi les artistes les plus marquants et les plus polyvalents de l’avant-garde, Mondrian a joué un rôle décisif dans l’évolution de la peinture de la figuration à l’abstraction. Avec 89 œuvres provenant de collections privées et publiques en Europe et aux États-Unis, «Mondrian Evolution» retrace le parcours saisissant de l’artiste, de peintre paysagiste du 19ème siècle à l’un des protagonistes majeurs de l’art moderne. L’exposition offre une rare occasion de découvrir sous un jour nouveau le travail de Mondrian, qui a profondément influencé le 20ème siècle non seulement dans le domaine de l’art mais aussi dans ceux du design, de l’architecture, de la mode et de la culture pop. Il s’agit de la première exposition individuelle consacrée à l’artiste en Suisse depuis 50 ans. L'exposition sera ensuite présentée à Düsseldorf au Kunstsammlung Nordrhein-Westfalen.
La collection de la Fondation Beyeler comprend surtout des œuvres des périodes plus tardives de Mondrian, mais l’exposition se concentre principalement sur les œuvres des débuts de l’artiste, dont le développement est influencé non seulement par la peinture de paysage hollandaise de la fin du 19ème siècle mais aussi par le symbolisme et le cubisme. Ce n’est qu’au début des années 1920 que Mondrian passe à un langage pictural pleinement non figuratif, restreint à des agencements orthogonaux de lignes noires et d’aires de blanc et des trois couleurs primaires bleu, rouge et jaune. Les tableaux abstraits de Mondrian sont l’aboutissement d’un long processus de réflexion artistique en tension entre les pôles de l’intuition et de la précision, ainsi que d’une remise en question personnelle intense et incessante. Il concevait l’abstraction comme un processus de rapprochement d’une vérité et d’une beauté absolues, vers lesquelles il tendait en tant qu’artiste. Sa versatilité stylistique est la conséquence de sa quête constante de l’unité et de l’essence même de l’image. Il utilisait lui-même le terme «évolution» – mais pas au sens de Charles Darwin. Pour Mondrian, le terme «évolution» signifiait l’accumulation d’expériences sur lesquelles bâtir une nouvelle étape de développement artistique menant à son tour à de nouvelles réalisations et connaissances.
L’exposition est conçue de manière chronologique mais elle tire son expressivité de la confrontation d’œuvres précoces et tardives, qui met en lumière les forces de transformation à l’œuvre dans le travail de Mondrian. Au fil de neuf salles d’exposition, on retrouve des motifs récurrents tels les moulins à vent, les dunes, la mer, les bâtiments de ferme se reflétant dans l’eau et les plantes, représentés à des degrés divers d’abstraction. Dans ses paysages, Piet Mondrian explore l’éclat et le rayonnement de la couleur – ce qui donne à ces tableaux leur apparence extraordinairement lumineuse et vive – ainsi que l’influence de la lumière et l’expérience de l’espace, de la surface, de la structure et des reflets.
Le tableau Moulin au soleil, 1908, dont la radicalité apparaît encore aujourd’hui, avait provoqué un tollé parmi les critiques de l’époque avec son explosion de couleurs et sa technique picturale d’apparence sommaire. L’exposition présente également l’œuvre Le nuage rouge, 1907, qui saisit le moment magique et fugace auquel le soleil couchant teinte un nuage rouge vif alors même que le paysage et le ciel demeurent encore d’un bleu éclatant. Ce tableau appartient à un groupe d’œuvres que Mondrian a peintes au crépuscule, lorsque les couleurs et les combinaisons chromatiques sont soumises à des transformations intenses. Dans ses autoportraits dessinés de 1908, il se représente également au crépuscule, les pupilles grand ouvertes et réceptives aux plus infimes nuances chromatiques produites par la lumière. Le tableau de grand format Forêt près d’Oele, 1908, du Kunstmuseum Den Haag offre une perspective dirigée vers le soleil, situé au-dessus de l’horizon. La succession des troncs d’arbres qui se teintent de rouge ou de violet dans le contre-jour crée l’illusion de spatialité.
Après les explosions chromatiques des années 1907 à 1911, Mondrian, inspiré par sa rencontre avec le cubisme à Paris, revient à des couleurs moins éclatantes. Des tons gris et ocres dominent désormais ses tableaux et la ligne en tant que telle devient toujours plus importante. Mondrian poursuit son exploration de thèmes comme l’abstraction. La métamorphose de ses représentations d’arbres est particulièrement impressionnante, donnant à voir le raisonnement qui sous-tend sa quête picturale. L’expérience de ces tableaux permet à Mondrian de se détacher entièrement de la figuration. Composition No. IX, 1913, un prêt du Museum of Modern Art à New York, est une imbrication de formes pour la plupart caractérisées par des angles droits.
New York City 1 est l’œuvre la plus récente de l’exposition et appartient à un petit groupe de tableaux créés autour de 1941. Sa composition est semblable à celle de Forêt près d’Oele de 1908, mis à part le fait qu’elle n’entretient plus aucun rapport avec un paysage réel mais tient d’une «abstraction pure». L’œuvre est inachevée et apporte un témoignage important du processus de travail de Mondrian dans les dernières années de sa vie. À New York, il avait commencé à reconfigurer ses images et à les rendre plus dynamiques et plus rythmiques à l’aide de bandes de papier. Les surfaces colorées cèdent alors le pas aux lignes de couleur.
Né en 1872 à Amersfoort aux Pays-Bas, Mondrian entre tôt en contact avec l’art : son père enseigne le dessin, son oncle est un peintre amateur à succès, influencé par la peinture de paysage de l’École de La Haye, incarnation spécifiquement néerlandaise de l’impressionnisme. Après une éducation calviniste et une formation en tant que professeur de dessin, entre 1892 et 1895 Mondrian étudie à la Rijksakademie van Beeldende Kunsten à Amsterdam. Il continue à travailler en tant que professeur de dessin, peint des portraits sur commande et réalise des dessins scientifiques pour l’Université de Leyde. Mais il poursuit également ses ambitions artistiques et développe rapidement son propre style. La plupart des œuvres de cette période, qui représentent majoritairement des moulins à vent, des rivières et des bâtiments de ferme, témoignent encore de l’influence de l’École de La Haye. À partir de cette base, Mondrian élargit avec détermination le champ de ses possibilités artistiques.
L’art de Mondrian est étroitement lié à son intérêt pour la philosophie et l’ésotérisme. À partir de 1908, il se passionne pour la théosophie ; influencé par les écrits de Rudolf Steiner – alors encore théosophe – en 1909 il adhère à la section néerlandaise de la Société théosophique. Sa rencontre avec le cubisme mène fin 1911 à un premier séjour à Paris qui dure jusqu’en 1914, lorsque Mondrian ne peut y retourner en raison du début de la Première Guerre mondiale. En 1919, il s’installe durablement à Paris.
Après la Première Guerre mondiale, les artistes sont nombreux à chercher un renouveau culturel radical. Aux Pays-Bas, un groupe d’artistes d’avant-garde se constitue et publie à partir de 1917 la revue De Stijl. Mondrian formule l’intention du groupe de démanteler les traditions afin de refonder tous les aspects de la vie sur la base des éléments essentiels de l’art tels qu’il les défend.
Dans des écrits théoriques, Mondrian tente d’exposer son programme artistique. Il désigne sa nouvelle forme d’expression picturale sous le terme de «néoplasticisme», qu’il conçoit en première ligne comme une concentration sur les moyens d’expression essentiels de la peinture : d’une part le noir et le blanc, situés aux extrêmes opposés de l’échelle des couleurs, d’autre part les couleurs primaires jaune, rouge et bleu. Le noir est généralement celui des lignes qui s’étirent à la verticale et à l’horizontale, se croisant à angle droit. La combinaison de ces éléments ouvre des possibilités de composition infinies. Mondrian s’intéresse à l’image essentielle, à la création d’un équilibre parfait et tendu à la fois, dans lequel tous les éléments semblent à leur place.
Mondrian passe les 25 dernières années de sa vie dans les trois métropoles de l’art moderne: Paris, Londres et New York. De fin 1911 à 1938, avec une interruption due à la Première Guerre mondiale, il vit à Paris. Après quelques années à Londres, en 1940 il s’installe à New York, où il décède d'une pneumonie en 1944 âgé de 71 ans. En tant que membre de la Société théosophique, Mondrian accordait une grande importance à l’internationalité. Il accède au statut de célébrité dès les années 1920 en tant qu’artiste d’avant-garde et co-initiateur de la peinture abstraite. Ses ateliers deviennent des lieux légendaires, sources d’inspiration surtout pour des artistes plus jeunes dont Willem de Kooning et Lee Krasner.
Dans le cadre de l’exposition, la Fondation Beyeler présente le film «Piet & Mondrian», un court-métrage de Lars Kraume, l’un des cinéastes les plus renommés de langue allemande. Le film prend pour point de départ l’essai Réalité naturelle et réalité abstraite, formulé par Mondrian en 1919/20 sur le mode du dialogue pour y exposer ses considérations et ses réflexions sur l’abstraction dans l’art. Le grand acteur allemand de théâtre et de cinéma Lars Eidinger donne vie au texte théorique de Mondrian. «Piet & Mondrian» a été produit par Felix von Boehm / Lupa Film avec le soutien financier du Medienboard BerlinBrandenburg. Le scénario a été écrit par Constantin Lieb.
«Mondrian Evolution» est une exposition de la Fondation Beyeler, Riehen/Bâle et de la Kunstsammlung Nordrhein-Westfalen, Düsseldorf, en coopération avec le Kunstmuseum Den Haag. L’exposition est placée sous le commissariat d’Ulf Küster, Senior Curator, Fondation Beyeler, Kathrin Beßen et Susanne MeyerBüser, Kunstsammlung Nordrhein-Westfalen.
Catalogue de l'exposition
Hatje Cantz, 2022
Le catalogue de l’exposition a été conçu par Irma Boom, graphiste de renom international qui au fil des dernières années a renouvelé les possibilités infinies du livre. Le catalogue paraît en allemand et en anglais au Hatje Cantz Verlag, Berlin. Sur 264 pages, il réunit des articles rédigés par Benno Tempel, Caro Verbeek, Ulf Küster, Kathrin Beßen, Susanne Meyer-Büser, Charlotte Sarrazin et l’artiste Bridget Riley, avec une préface de Sam Keller et Ulf Küster.
Hatje Cantz, 2022
À l’occasion de l’exposition, le Hatje Cantz Verlag, Berlin publie également Mondrian A–Z : dans ce texte amusant, Ulf Küster explore en ordre alphabétique les thèmes qui intéressaient le peintre et nous offre ainsi des aperçus de son univers mental et sensoriel. 120 pages, 32 illustration. En allemand et en anglais.
FONDATION BEYELER
Baselstrasse 77, 4125 Riehen
HATJE CANTZ VERLAG