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21/08/25

Exposition Ernst Ludwig Kirchner "Kirchner x Kirchner" @ Kunstmuseum Bern - Musée des Beaux-Arts de Berne

Kirchner x Kirchner
Kunstmuseum Bern, Berne
12 septembre 2025 - 11 janvier 2026

Ernst Ludwig Kirchner
Ernst Ludwig Kirchner
Farbentanz I (Entwurf für Essen) 
[Color Dance I (Project Essen)], 1932
Oil on canvas, 100 x 90 cm
Museum Folkwang, Essen, acquired in 1968 with the 
support of the Folkwang-Museumsverein and 
the Alfred und Cläre Pott-Stiftung
© Museum Folkwang Essen / ARTOTHEK

Ernst Ludwig Kirchner
Ernst Ludwig Kirchner
Esser [Eaters], 1930
Oil on canvas, 150 x 121 cm
Galerie Henze & Ketterer, Wichtrach/Bern
© Galerie Henze & Ketterer, Wichtrach/Bern

Avec Kirchner x Kirchner le Kunstmuseum Bern, Musée des Beaux-Arts de Berne, consacre une exposition exceptionnelle à l’expressionniste allemand Ernst Ludwig Kirchner (1880–1938). Elle s’articule autour de la grande rétrospective de 1933, organisée par l’artiste lui-même à la Kunsthalle Bern. Une démarche rare à l’époque, qui offre aujourd’hui de nouvelles perspectives.

L’exposition montre comment Kirchner a procédé à une sélection, un accrochage et un remaniement ciblés de ses oeuvres, tentant non seulement de (re)configurer sa carrière artistique, mais aussi de concevoir une expérience spécifique de l’espace. Quelque 65 oeuvres issues de toutes les phases de sa création, dont des prêts importants provenant de collections nationales et internationales prestigieuses, nous indiquent comment Kirchner se mettait lui-même en scène, incarnant à la fois le rôle de l’artiste et celui du concepteur de l’exposition.


Ernst Ludwig Kirchner
Ernst Ludwig Kirchner
Sonntag der Bergbauern 
[Mountain Peasants on Sunday], 1923-24/26
Oil on canvas, 170 x 400 cm
Federal Republic of Germany
© Bundesrepublik Deutschland

Ernst Ludwig Kirchner
Ernst Ludwig Kirchner
Alpsonntag. Szene am Brunnen 
[Sunday in the Alps. Scene at the Well], 1923-24/around 1929
Oil on canvas, with original painted frame,168 x 400 cm
Kunstmuseum Bern
© Kunstmuseum Bern

Pour la première fois, les deux oeuvres monumentales Alpsonntag. Szene am Brunnen (Dimanche sur l’alpe. Scène près de la fontaine, 1923-1924 / vers 1929, Kunstmuseum Bern) et Sonntag der Bergbauern (Dimanche des paysans de montagne, 1923-1924 / 1926, salle du cabinet de la Chancellerie fédérale, Berlin) sont à nouveau réunies et constitueront le point d’orgue de l’exposition. Les deux toiles inauguraient la rétrospective Kirchner à la Kunsthalle Bern en 1933, où elles étaient présentées côte à côte. Avec ces images puissantes, Kirchner exprimait sa façon de voir l’interaction entre monumentalité et aménagement de l’espace. Il voulait également prouver qu’il était capable de créer des oeuvres ayant un rayonnement public, des oeuvres qui dépassaient le cadre de l’espace d’exposition pour avoir un impact sur la société. Cela lui tenait particulièrement à coeur, car il avait longtemps envisagé de peindre la salle des fêtes du musée Folkwang à Essen mais, en 1933, ce projet avait définitivement échoué.

Bien que conçues comme des pendants, ces deux peintures monumentales n’ont plus jamais été exposées ensemble depuis 1933. Alpsonntag. Szene am Brunnen a été directement acheté par le Kunstmuseum Bern après l’exposition. Un acte symbolique s’il en est : il s’agissait du premier et unique achat d’un tableau par un musée suisse du vivant de l’artiste. Sonntag der Bergbauern a d’abord été prêté, puis finalement acquis en 1985 par la Collection d’art de la République fédérale d’Allemagne. Le fait que la Chancellerie fédérale allemande ait accepté de prêter ce tableau, accroché bien en vue, de manière permanente, dans la salle du Conseil des ministres, constitue à la fois une exception et un fait marquant.

Ernst Ludwig Kirchner
Ernst Ludwig Kirchner
Alpaufzug [Ascending the Alps], 1918/1919
Oil on canvas, 139 x 199 cm
Kunstmuseum St. Gallen, acquired 1955
© Kunstmuseum St. Gallen, photograph: Stefan Rohner

Ernst Ludwig Kirchner
Ernst Ludwig Kirchner
Berglandschaft von Clavadel 
[Mountain Landscape from Clavadel], 1925-26/27
Oil on canvas, 135 × 200,3 cm
Museum of Fine Arts, Boston, 
Tompkins Collection – Arthur Gordon Tompkins Fund
Photograph © 2025 Museum of Fine Arts, Boston

Parmi les autres points forts de l’exposition figurent des chefs-d’oeuvre tels que Rue, Dresde (1908/1919, Museum of Modern Art de New York), Rue avec cocotte rouge (1914/1925, Museo Nacional Thyssen-Bornemisza de Madrid), Paysage de montagne de Clavadel (1927, Museum of Fine Arts de Boston), Danse des couleurs I [Projet pour Essen] (1932, Museum Folkwang Essen) ou Les mangeurs (1930, Galerie Henze & Ketterer, Wichtrach/Berne).

Ernst Ludwig Kirchner
Ernst Ludwig Kirchner
Strasse mit roter Kokotte 
[Street with Red Cocotte], 1914/25 
Oil on canvas, 125 x 90,5 cm
Museo Nacional Thyssen-Bornemisza, Madrid
© Museo Nacional Thyssen-Bornemisza, Madrid

Ernst Ludwig Kirchner
Ernst Ludwig Kirchner
Sich kämmender Akt 
[Nude Woman Combing Her Hair], 1913
Oil on canvas, 125 x 90 cm
Brücke-Museum, Berlin 
© Brücke-Museum, Ernst Ludwig Kirchner, 
CC-BY-SA 4.0

Ernst Ludwig Kirchner : le commissariat d’exposition comme acte artistique

L’exposition Kirchner x Kirchner montre à quel point Ernst Ludwig Kirchner avait conscience de son rôle de commissaire d’exposition : en 1933, en étroite collaboration avec Max Huggler (1903-1994), alors directeur de la Kunsthalle Bern et plus tard directeur du Kunstmuseum Bern, il organise la rétrospective la plus complète de sa carrière. Il ne se contente pas de sélectionner les oeuvres et de concevoir leur disposition, mais réalise également l’affiche et le catalogue de l’exposition ; il rédige même un texte d’accompagnement sous le pseudonyme de Louis de Marsalle. Kirchner structure ainsi sciemment son oeuvre, retravaille certaines toiles et utilise l’espace d’exposition qui fait partie intégrante de son message artistique. Une lettre adressée à Max Huggler le 21 décembre 1932 montre à quel Ernst Ludwig Kirchner considérait l’exposition comme un acte artistique :
« Accrocher une exposition en ajustant les couleurs et les formes, c’est comme créer un tableau. »
L’exposition du Kunstmuseum Bern met pour la première fois l’accent sur cette perspective curatoriale. Elle ne cherche pas à reproduire fidèlement la rétrospective historique de 1933 mais à mettre en lumière sa structure, ses intentions et son impact dans une perspective contemporaine. Pourquoi un artiste écrit-il sa propre histoire et pourquoi Kirchner choisit-il précisément cette forme de représentation en 1933 ? Ce sont les questions centrales qui se posent à nous. Quelles étaient ses intentions ? Et comment cette mise en scène ciblée influence-t-elle, aujourd’hui encore, la perception de son oeuvre ?
« La rétrospective de 1933 était bien plus qu’une exposition, c’était un manifeste artistique. Elle reflétait en les concentrant les efforts de Kirchner pour trouver son propre langage visuel ainsi que son besoin de se repositionner sur le plan artistique. » -- Nadine Franci, conservatrice du département des dessins et arts graphiques au Kunstmuseum Bern et commissaire de l’exposition.
En opposant l’interprétation établie de l’histoire de l’art à la vision que Kirchner avait lui-même de son oeuvre, l’exposition Kirchner x Kirchner propose une nouvelle approche de sa conception artistique et met en même temps en évidence sa volonté créatrice en tant que commissaire.

Contexte historique de la rétrospective de 1933

L’exposition à la Kunsthalle Bern eut lieu de mars à avril 1933, à un moment décisif pour Kirchner tant sur le plan politique que personnel. En Allemagne, après la prise du pouvoir par les nationaux-socialistes, ses oeuvres font de plus en plus souvent l’objet de diffamation et sont retirées des musées. En Suisse, où il vit depuis 1917, il a l’occasion de donner une vue d’ensemble de son art.

Avec plus de 290 oeuvres, la rétrospective de 1933 fut l’exposition la plus complète jamais organisée du vivant de l’artiste. De nombreuses oeuvres provenaient de sa collection personnelle, mais Kirchner insista pour y inclure également des prêts provenant de collections publiques et privées. Il souhaitait ainsi donner l’image d’un artiste établi.
« Je pourrais facilement organiser toute l’exposition à partir de mes propres collections, mais ce serait mieux si certaines oeuvres provenant de collections publiques ou privées n’étaient pas à vendre [...]. » -- Ernst Ludwig Kirchner dans une lettre à Max Huggler, le 20 novembre 1932

 

Photographie de Ernst Ludwig Kirchner
Aura Hertwig-Brendel

Portrait d’Ernst Ludwig Kirchner, 1913/14

Photographie
Succession Ernst Ludwig Kirchner
© Nachlass Ernst Ludwig Kirchner,
courtesy Galerie Henze & Ketterer, Wichtrach/Bern
 
Kirchner x Kirchner : de l’époque de Die Brücke (1905-1913) aux oeuvres tardives de Davos (1917-1937)

Comme en 1933, Kirchner x Kirchner retrace le parcours de l’artiste, depuis ses débuts expressionnistes au sein du groupe Die Brücke jusqu’aux oeuvres tardives de Davos. Contrairement à l’exposition historique, les différentes phases de sa création sont aujourd’hui représentées de manière plus équilibrée. L’exposition montre également des travaux qui ne figuraient pas à Berne en 1933, soit parce que Kirchner les avait délibérément exclus, soit parce qu’ils n’étaient pas disponibles. Cela permet de comprendre les décisions prises par Kirchner à l’époque et les raisons qui les ont motivées.

La présentation s’organise selon différents thèmes, répartis sur cinq salles. Des oeuvres centrales ont donc été regroupées et mettent aussi en lumière la pensée curatoriale de Kirchner. La première salle est consacrée aux années passées à Dresde et à Berlin, avec des nus, des scènes de rue et l’univers du music-hall. Aujourd’hui encore, ces oeuvres sont considérées comme le sommet de son art. Elles n’étaient que peu représentées dans l’exposition de 1933 : Kirchner y montrait principalement des oeuvres qui lui avaient déjà valu une reconnaissance en Allemagne ou qui mettaient particulièrement en évidence ses innovations stylistiques.

En face, dans la dernière salle, se trouvent les oeuvres tardives, longtemps considérées comme moins importantes. Pour Kirchner cependant, elles marquaient en 1933 l’apogée de son évolution et occupaient donc une place prépondérante dans la rétrospective historique.

L’objectif de Kirchner était de mettre en valeur tout l’éventail de son style et de retracer son évolution à travers ses oeuvres. Il avait délibérément juxtaposé des oeuvres issues de différentes phases créatives et renoncé à un accrochage chronologique. Il avait même en partie retravaillé certaines oeuvres de ses débuts afin de mettre en évidence son évolution. Kirchner x Kirchner reprend cette approche afin que l’on puisse découvrir à la fois la diversité stylistique et les réflexions conceptuelles qui sous-tendent la présentation de l’artiste.

La grande salle principale est consacrée à la rétrospective historique. La démarche curatoriale de Kirchner a été reprise : paires d’oeuvres reconstituées, espaces intentionnellement ouverts sur d’autres salles et accent mis sur certaines couleurs. Parallèlement, le choix des oeuvres permet de retracer l’historique de l’acquisition de Alpsonntag. Szene am Brunnen (Dimanche sur l’alpe. Scène près de la fontaine) par le Kunstmuseum Bern, documentant ainsi une partie de l’histoire de la collection.

Les deux salles attenantes, plus petites, se concentrent sur les aspects formels et structurels. Une sélection d’oeuvres sur papier montre clairement que Kirchner a expérimenté la couleur, la surface, la ligne et le mouvement pendant des décennies et qu’il est resté fidèle à lui-même malgré l’évolution de son langage formel.

La sélection des oeuvres exposées, reliées au contexte historique, et le nouveau regard porté sur l’artiste font de l’ambitieux projet d’exposition Kirchner x Kirchner une expérience unique.

Kirchner x Kirchner - Catalogue
Kirchner x Kirchner
Catalogue édité par Nina Zimmer et Nadine Franci
Avec des contributions de Nadine Franci et Katharina Neuburger 
ainsi qu’une préface de Nina Zimmer
160 pages, env. 80 reproductions, 22 x 28 cm, broché,
Éditions Hirmer, 2025
Édition allemande: ISBN 978-3-7774-4642-4
Édition anglaise: ISBN 978-3-7774-4696-7

Vernissage
L’exposition sera inaugurée le jeudi 11 septembre 2025, à partir de 18:30. Ce soir-là, l’entrée sera libre.

Commissaire d’expositionNadine Franci, conservatrice du département des dessins et arts graphiques Kunstmuseum Bern

KUNSTMUSEUM BERN
Hodlerstrasse 8–12, 3011 Berne

17/08/25

Antoni Clavé @ Galerie Minsky, Paris

Antoni Clavé
Galerie Minsky, Paris
18 septembre - 18 octobre 2025

Photographie : Antoni Clavé à Montparnasse
Antoni Clavé à Montparnasse 
© Archives Antoni Clavé

Antoni Clavé
Antoni Clavé 
Nature morte au compotier, 1945 
Huile sur panneau d'Isorel, 81 cm x 65 cm
Photo Courtesy Galerie Minsky

Antoni Clavé
Antoni Clavé
Guerrier, c. 1962 
Technique mixte sur papier marouflé 
sur panneau, 74,5 x 54,5 cm
Photo Courtesy Galerie Minsky

La Galerie Minsky souhaite accompagner la redécouverte de l’artiste catalan Antoni Clavé. Elle présente à Paris une lecture sensible et incarnée de l’oeuvre d’un artiste entre deux mondes : l’Espagne et la France, le théâtre et la peinture, l’intime et le monumental. Alors qu’une rétrospective d’envergure se prépare au centre d’art Palau Martorell à Barcelone, la Galerie Minsky présente à Paris pour la première fois une vingtaine d’oeuvres d’Antoni Clavé (1913–2005). Cette exposition couvre les années 1945 à 1975, une période qui témoigne de ses différentes évolutions.

L’exposition présente l’univers de Clavé, à la fois théâtral, lyrique, intuitif et symbolique. Dès les années 40, le peintre catalan installé récemment à Paris développe un style singulier, entre raffinement intimiste et expérimentation formelle. Inspiré par les Nabis et profondément marqué par sa rencontre avec Picasso en 1944, Clavé explore un large registre de médiums : peinture, collage, gravure où s’entremêlent décors et costumes. En 2015, le Musée Picasso de Münster lui a dédié une exposition intitulée Antoni Clavé - Ein Spanier in Paris.

L’exposition réunit une vingtaine d’oeuvres majeures, de la Nature morte au compotier (c. 1945) à la série emblématique des Rois et Guerriers des années 60, en passant par le triptyque de paravents conçu en 1949 pour la pièce de théâtre Carmen dans les Ballets de Roland Petit. Ce volet scénographique, essentiel dans sa pratique, est mis en lumière ici : Antoni Clavé reste en dialogue avec le théâtre, et ce, tout au long de sa carrière.

Ses oeuvres deviennent des objets-théâtres, où lettres, mots, fragments et textures agissent comme des personnages silencieux. On y retrouve un goût marqué pour les techniques mixtes et l’assemblage, dans un désordre bouillonnant, proche de celui de son atelier.

Antoni Clavé joue sur les tensions : entre figuration et abstraction, entre brutalisme et poésie, entre ordre et chaos. Les matériaux pauvres qu’il emploie tels que le carton, bois, tissu ou des encore objets usés prennent une force symbolique inattendue.

Ses oeuvres, comme son atelier, sont des juxtapositions vibrantes, riches de résonances intimes et collectives.

Antoni Clavé — Biographie

Né à Barcelone en 1913, Antoni Clavé débute très tôt dans le dessin : à 18 ans, il crée des bandes dessinées et des affiches publicitaires. Son premier métier est celui de peintre en bâtiment, une expérience qui façonne son approche artisanale de l’art. Entre 1934 et 1936, alors qu’il réalise des affiches de cinéma dans sa ville natale, il s’initie au collage et aux assemblages : papiers, cartons, matériaux de récupération, lithographies, plâtre, tissus, textures sales ou accidentées deviennent ses terrains d’exploration.

Exilé en France à la suite de la guerre civile espagnole, il s’installe à Paris, ville où il entre dans l’histoire de l’art moderne. Il est exposé dès 1957 par Ernst Beyeler dans sa mythique galerie de Bâle, puis en 1978 au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris. En 2006, une exposition d’Antoni Clavé a eu lieu à l’Espace d’Art Contemporain Fernet Branca.

Photographie : Antoni Clavé dans son atelier
Antoni Clavé dans son atelier, Saint-Tropez, 1968 
Photographie © Jacques Gomot
« Mon atelier à moi, c’est mon cocon, mon village, ma rue, mon quartier »
— Antoni Clavé
En 1963, Antoni Clavé s’installe au Cap-Saint-Pierre à Saint-Tropez, où il se fait construire une maison et un vaste atelier, bientôt complété par un second espace dédié à la gravure. Les estampes d’Antoni Clavé ont d’ailleurs été exposées en 2018 à la BnF à Paris.

GALERIE MINSKY
37 rue Vaneau, 75007 Paris

03/08/25

Guillaume Bresson @ Musée de Grenoble - "En regard" des collections permanentes du musée

Guillaume Bresson. En regard
Musée de Grenoble
Jusqu'au 28 septembre 2025

Guillaume Bresson - Musée de Grenoble
© Courtesy Musée de Grenoble

Dans le cadre du cycle « En regard », le Musée de Grenoble propose à des artistes contemporains de se confronter à ses collections permanentes. Après Pierre Buraglio et sa rencontre avec Philippe de Champaigne, c’est au tour de Guillaume Bresson d’explorer les chefs-d’oeuvre du musée. 

Né en 1982 à Toulouse et formé aux Beaux-Arts de Paris, GUILLAUME BRESSON est une figure majeure de la peinture française. Vivant à New York après Paris et Berlin, le peintre est connu pour ses toiles hyperréalistes dans lesquelles il met en scène, de manière très chorégraphiée, des personnages en proie à des combats dans des scènes de rue. S’il s’inspire de la peinture classique avec des références à la peinture religieuse et d’histoire, il ancre son oeuvre dans le présent, en raccrochant ses créations à des problématiques sociales actuelles. Pour parvenir à cette précision photographique, le peintre commence son travail par des séances de photographie préparatoires avec modèles dans son atelier. Ceux-ci se prêtent à la mise en scène de leurs corps, proposant des poses et des mouvements théâtralisés qui évoquent la peinture baroque. À travers un travail de montage, l’artiste isole et détache ensuite les corps avant de les réagencer en groupe. Guillaume Bresson construit ainsi des tableaux dans lesquels le langage corporel occupe une place centrale dans la création du récit.

Après s’être confronté aux peintures d’Horace Vernet du Château de Versailles, Guillaume Bresson a répondu à l’invitation du Musée de Grenoble où il propose un dialogue avec les tableaux historiques et modernes de la collection. À travers une trentaine d’oeuvres qui jalonnent le parcours permanent du XVIIe siècle à nos jours, l’artiste a soigneusement composé l’accrochage, en correspondance, tissant des liens à la fois formels et thématiques, une rencontre qui selon les siècles, est furtive, en continuité ou conflictuelle.

Commissaire de l'exposition : Sébastien Gokalp, Directeur du musée de Grenoble

Une exposition organisée en partenariat avec la Galerie Nathalie Obadia , Paris/Bruxelles.
Avec le soutien de l’Établissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles.

MUSÉE DE GRENOBLE
5 place Lavalette - 38000 Grenoble 

Guillaume Bresson. En regard
Musée de Grenoble, 14 juin - 28 septembre 2025

25/06/25

Vija Celmins @ Fondation Beyeler, Riehen / Bâle

Vija Celmins
Fondation Beyeler, Riehen / Bâle
15 juin – 21 septembre 2025

Vija Celmins Art
Vija Celmins
Snowfall #1 (Chute de neige #1), 2022-2024
Huile et alkyde sur lin, 132 x 184 cm 
Glenn and Amanda Fuhrman Collection, New York City, États-Unis 
© Vija Celmins, Courtesy Matthew Marks Gallery, 
Photo: Aaron Wax, Courtesy Matthew Marks Gallery

Vija Celmins Art
Vija Celmins
Astrographic Blue (Bleu astrographique), 2019-2024
Huile sur toile, 50 x 33 cm 
Matthew Marks Gallery
© Vija Celmins, Courtesy Matthew Marks Gallery, 
Photo: Aaron Wax, Courtesy Matthew Marks Gallery

Vija Celmins Art
Vija Celmins 
Untitled (Web #1) [Sans titre (Toile #1)], 1999
Fusain sur papier, 56,5 x 64,9 cm, Tate, 
ARTIST ROOMS, Londres, Royaume-Uni 
© Vija Celmins, Courtesy Matthew Marks Gallery, 
Photo: Tate

La Fondation Beyeler présente l’une des plus importantes expositions personnelles jamais consacrées à l’artiste américaine VIJA CELMINS (*1938, Riga) en Europe. Connue pour ses peintures et ses dessins envoûtants de galaxies, de surfaces lunaires, de déserts et d’océans, Vija Celmins nous invite à ralentir, à observer de près et à nous immerger dans les surfaces captivantes de ses œuvres. Telles des toiles d’araignée, elles nous happent et nous incitent à contempler les tensions entre surface et espace, proximité et distance, immobilité et mouvement. Organisée en étroite collaboration avec l’artiste, l’exposition réunit environ 90 œuvres, principalement des peintures et des dessins, de même qu’un petit nombre de sculptures et d’œuvres graphiques.

Née à Riga (Lettonie) en 1938, Vija Celmins fuit son pays natal en 1944 avant d’émigrer avec sa famille aux États-Unis en 1948. Elle grandit à Indianapolis puis part suivre des études d’art à Los Angeles, avant de s’installer au Nouveau-Mexique, à New York et enfin à Long Island, où elle vit et travaille aujourd’hui. Son travail, tenu en très haute estime, est prisé tant par les musées que par les collections privées de tout premier plan. Cependant, les occasions de face-à-face approfondi avec ses œuvres sont extrêmement rares, dû entre autres au fait qu’au fil de sa carrière l’artiste n’a réalisé qu’environ 220 peintures, dessins et sculptures. Vija Celmins a toujours travaillé à son propre rythme, refusant de se plier aux courants dominants du monde de l’art et maintenant une attention résolue à sa pratique minutieuse.

L’exposition propose un aperçu très complet d’une carrière remarquable qui s’étend sur six décennies, présentant des ensembles soigneusement sélectionnés de peintures, de dessins, d’œuvres graphiques et de sculptures. S’ouvrant sur une sélection d’importantes peintures d’objets du quotidien datant des années 1960, l’exposition culmine avec une salle de magistrales peintures récentes de neige tombant d’un ciel nocturne, qui évoquent tout le mystère du cosmos.

Vija Celmins Art
Vija Celmins 
Lamp #1 (Lampe #1), 1964
Huile sur toile, 62,2 x 88,9 cm
Vija Celmins, Courtesy Matthew Marks Gallery
© Vija Celmins, Courtesy Matthew Marks Gallery
Photo: Aaron Wax 

Vija Celmins Art
Vija Celmins
Clouds (Nuages), 1968
Graphite sur papier, 34,9 x 47 cm
Collection Ayea + Mikey Sohn, Los Angeles
© Vija Celmins, Courtesy Matthew Marks Gallery
Photo: McKee Gallery, New York

L’exposition débute avec les peintures réalisées par Vija Celmins de 1964 à 1968, lorsqu’elle vivait dans un atelier sur Venice Beach à Los Angeles. À la différence de nombreux·ses artistes travaillant dans la ville dans les années 1960, Vija Celmins n’était pas attirée par la lumière et les couleurs éclatantes de Californie. Son univers personnel était principalement d’ordre intérieur. En 1964, elle réalise un ensemble de tableaux représentant chacun un objet ou un appareil du quotidien, parmi eux une assiette, un radiateur, une plaque chauffante et une lampe. Inspirée par les œuvres de Giorgio Morandi et Diego Velázquez vues lors d’un voyage en Italie et en Espagne en 1962, et prenant ses distances avec les couleurs vives du pop art, elle utilise une palette sourde de bruns et de gris, agrémentée d’occasionnels éclairs de rouge électrique.

Pendant les deux années suivantes, de 1965 à 1967, Vija Celmins réalise plusieurs peintures basées sur des images de la Seconde Guerre mondiale et d’autres conflits trouvées dans des livres et des magazines ; des bombardiers suspendus dans un ciel gris ou écrasés au sol, un homme en feu s’enfuyant d’une voiture embrasée, les émeutes raciales de Los Angeles en couverture du magazine Time. Silencieux et statiques, ces tableaux inquiétants évoquent à la fois la mémoire de la guerre et une réalité plus récente, dans laquelle l’omniprésence des images produit un effet de distanciation.

Vija Celmins Art
Vija Celmins 
Untitled (Big Sea #2) [Sans titre (Grand océan #2)], 1969
Graphite sur fond acrylique sur papier, 85,1 x 111,8 cm
Collection privée
© Vija Celmins, Courtesy Matthew Marks Gallery

Vija Celmins Art
Vija Celmins 
Untitled (Coma Berenices #4) 
[Sans titre (Coma Berenices #4))], 1973
Graphite sur fond acrylique sur papier, 31,1 x 38,7 cm 
UBS Art Collection 
© Vija Celmins, Courtesy Matthew Marks Gallery

Vija Celmins Art
Vija Celmins
Untitled (Regular Desert) 
[Sans titre (Désert régulier)], 1973
Graphite sur fond acrylique sur papier, 30,5 x 38,1 cm 
Collection privée 
© Vija Celmins, Courtesy Matthew Marks Gallery, 
Photo: Kent Pell

Vija Celmins Art
Vija Celmins 
Desert Surface #1 ( Surface du désert #1), 1991
Huile sur bois, 45,7 x 54,9 cm 
Mary Patricia Anderson Pence 
© Vija Celmins, Courtesy Matthew Marks Gallery

De 1968 à 1992, Vija Celmins se consacre presque exclusivement au dessin. Elle continue de travailler à partir de photographies, trouvées dans des livres et des magazines ou prises par elle-même. Ses sujets sont les nuages ainsi que la surface de la lune, du désert et de l’océan. Elle commence avec un ensemble de dessins de paysages lunaires basés sur des images prises à la fin des années 1960 par les sondes lunaires américaines, qui rapportent dans les foyers de nombreux·ses habitant·e·s de la planète des gros plans d’un lieu jusqu’alors inaccessible. En 1973 s’ensuivent de premiers dessins de galaxies basés sur des images des télescopes de la NASA. Ces photographies incitent Vija Celmins à créer des images qui transforment en expérience visuelle la tension entre la profondeur de ces espaces et la surface de l’image – un élan qui anime encore et toujours son travail.

Pendant ses années de résidence à Los Angeles, Vija Celmins arpente les déserts de Californie, du Nevada et du Nouveau-Mexique, où elle réside également plusieurs mois. Fascinée par ces paysages démesurés, elle commence à représenter par le dessin le silence et la sensation de temps suspendu qui les caractérisent. Vers la fin des années 1970, Vija Celmins crée une sculpture qui donne une forme nouvelle à sa confrontation avec la réalité. To Fix the Image in Memory I-XI, 1977–1982, comprend onze pierres différentes ramassées dans le désert du Nouveau-Mexique, présentées côte à côte avec leurs doubles ; onze copies de bronze, peintes de telle manière que l’original et sa réplique puissent à peine être distingués à l’œil nu.

Les images de Vija Celmins sont basées sur des photographies ou, dans le cas de ses rares sculptures, sur des objets servant de modèles. Celmins use de ces matrices comme d’un outil, qui lui permet de ne pas avoir à se soucier de questions de composition et de cadrage. Cependant, elle ne réalise pas de copie d’un original ; il ne s’agit pas de photoréalisme. On pourrait plutôt dire que Vija Celmins recrée ou reconstitue l’original. Ses images sont construites d’innombrables couches de graphite ou de fusain sur papier et de peinture à l’huile sur toile. C’est comme si Vija Celmins cherchait à saisir et à tracer l’inconcevable immensité à la main. Ceci apparaît tout particulièrement dans ses nombreuses peintures de ciels nocturnes étoilés, un motif qui fascine Vija Celmins depuis ses débuts.

En 1992, Vija Celmins tombe sur des illustrations de toiles d’araignée dans un livre. Attirée par leurs fils fragiles et leurs formes concentriques, elle réalise un ensemble de peintures et de dessins au fusain. Cette exploration se poursuit avec des peintures d’objets aux surfaces texturées ; la couverture d’un livre japonais, l’émail craquelé d’un vase coréen, la surface éraflée d’ardoises dénichées dans des brocantes à Long Island, la forme grêlée d’un coquillage travaillé par l’érosion – chacune de ces peintures proposant une méditation exquise sur le passage du temps.

Dans la dernière salle de l’exposition, cette méditation se poursuit avec les tableaux les plus récents de Veja Celmins, qui sont parmi les plus vastes qu’elle ait jamais réalisés. Basés sur des photographies de flocons de neige illuminés dans un ciel nocturne, ils véhiculent un sens profond de silence et de révérence émerveillée.

Pour accompagner l’exposition, la Fondation Beyeler présente « Vija », un court-métrage des cinéastes de renom Bêka & Lemoine. En 30 minutes, le film dessine un portrait tout en spontanéité de l’artiste, qui partage ses réflexions sur la pratique de toute une vie, ouvrant les portes de son atelier et les tiroirs de ses archives. Le portrait entraîne les spectatrices et les spectateurs dans un voyage au fil des formes, des images et des pensées qui nourrissent la sensibilité incomparable de Vija Celmins.

L’exposition « Vija Celmins » est placée sous le commissariat de Theodora Vischer, Chief Curator de la Fondation Beyeler, et de l’écrivain et commissaire d’exposition James Lingwood.

Un catalogue richement illustré, réalisé sous la direction de Theodora Vischer et James Lingwood pour la Fondation Beyeler et conçu par Teo Schifferli, est publié au Hatje Cantz Verlag, Berlin. Sur 208 pages, il réunit « Notes » de Vija Celmins et de brèves contributions de Julian Bell, Jimena Canales, Teju Cole, Rachel Cusk, Marlene Dumas, Katie Farris, Robert Gober, Ilya Kaminsky, Glenn Ligon et Andrew Winer, avec une introduction de James Lingwood.

FONDATION BEYELER
Baselstrasse 101, 4125 Riehen

17/04/25

Exposition Andrea Appiani @ Château de Bois-Préau, Rueil-Malmaison - Musée national des châteaux de Malmaison et de Bois-Préau - "Appiani (1754-1817). Le peintre de Napoléon en Italie"

Appiani (1754-1817) 
Le peintre de Napoléon en Italie
Musée national des châteaux de Malmaison et de Bois-Préau
Château de Bois-Préau, Rueil-Malmaison
16 mars - 28 juillet 2025

Andrea Appiani - Affiche
Appiani (1754-1817) 
Le peintre de Napoléon en Italie
Affiche de l'exposition
Courtesy GrandPalaisRmn

Andrea Appiani - Napoléon
Andrea Appiani 
Le Général Bonaparte et le Génie de la victoire 
gravant ses hauts faits à la bataille du pont de Lodi, 1796 
© Collection of the Earl of Rosebery

Andrea Appiani - Oeuvre
Andrea Appiani 
Zéphyr et Flore, 1792 
155 x 160 cm, Milan, Galleria d’Arte Moderna 
© Ville de Milan – tous droits réservés

Une centaine d’œuvres – peintures, dessins, gravures, médailles appartenant à des collections européennes publiques et privées – sont réunies pour la première rétrospective organisée en France sur cet artiste, considéré comme le plus important peintre de la période néo-classique au nord de l’Italie. L’exposition révéle un portraitiste attachant et un fresquiste brillant, malgré la destruction d’une partie de ses décors peints au Palais Royal et dans certains hôtels particuliers milanais durant les bombardements de 1943.

Victorieux à la bataille du Pont de Lodi le 10 mai 1796, le général Bonaparte fait son entrée dans Milan le 15. Il y rencontre Andrea Appiani dont le talent est reconnu pour des décors de théâtre, d’hôtels particuliers et d’églises ainsi que des portraits. La manière de l’artiste a déjà perdu de la relative raideur de ses débuts et le peintre-décorateur sait combiner la précision et la fermeté du trait avec la délicatesse du modelé et la suavité de la matière. Trois ans plus tard, au retour des Français, à l’occasion de la Deuxième campagne d’Italie, Andrea Appiani se voit confier par Napoléon la charge de sélectionner les œuvres d’art prélevées dans les églises et les couvents pour enrichir et faire rayonner les musées du Nord de la péninsule.

Andrea Appiani - Junon
Andrea Appoani
La Toilette de Junon ou Junon et les Grâces 
Fondazione Brescia Musei, Pinacoteca Tosio Martinengo, Brescia 
© Archivio Fotografico Musei Civici di Brescia- Fotostudio Rapuzzi

Andrea Appiani - Tableau
Andrea Appiani
 
Portrait de Francesca Ghirardi Lecchi, 1803 
Huile sur toile 97,5 x 72,5 cm 
Fondazione Trivulzio, Milan 
© Fondazione Trivulzio, Milano 

L’ascension d’Appiani, iconographe de la république puis du Royaume d’Italie est consacrée par le nombre important de commandes publiques et privées qu’il reçoit alors. En cinq séquences chronologiques et thématiques, l’exposition permet de montrer l’œuvre de l’artiste à la fois fresquiste et peintre de chevalet : La carrière pré-napoléonienne, Les Fastes de Napoléon, Portraits publics et privés, Décors à fresque et, Fortune artistique d’Appiani.

Présentée dans les salons du château de Bois-Préau, l’exposition révèle au public le talent et la richesse de l’œuvre de cet artiste au service de l’Empereur.

L’exposition présente la manière sensible, monumentale ou intimiste du plus grand artiste milanais de son temps : les débuts d’un peintre formé au dix-huitième siècle, les scènes de la geste napoléonienne et de la république naissante, les effigies de Napoléon et Joséphine, les études et dessins préparatoires pour les décors des hôtels particuliers et des églises.

Exposition produite par le GrandPalaisRmn. L’exposition est réalisée en collaboration avec le Palazzo Reale de Milan qui en présentera une variante sous le titre "Appiani. Lo splendore di Milano dall’età di Parini a Napoleone", de septembre 2025 à janvier 2026.

Commissaire de l'exposition : Rémi Cariel, Conservateur en chef du patrimoine au musée national des châteaux de Malmaison et Bois-Préau

Directrice du musée : Elisabeth Caude, Directrice du Service à Compétence Nationale des musées nationaux des châteaux de Malmaison et Bois-Préau, de l’île d’Aix et de la Maison Bonaparte à Ajaccio

CHATEAU DE BOIS-PREAU
1 B Av. de l'Impératrice Joséphine, 92500 Rueil-Malmaison

06/04/25

Matisse et Marguerite @ MAM de Paris - Exposition "Matisse et Marguerite. Le regard d’un père", Musée d’Art Moderne de Paris

Matisse et Marguerite
Le regard d’un père
Musée d’Art Moderne de Paris
4 avril - 24 août 2025

Henri Matisse, Portrait de Marguerite
Henri Matisse
Portrait de Marguerite
Issy-les-Moulineaux, 1918
Huile sur bois, 46 x 37,8 cm
West Palm Beach, Floride, Norton Museum of Art
Don de Jean et Martin Goodman, de Palm Beach, Floride, 1986
Crédit : Norton Museum of Art
« Au temps de mon père, on vivait avec son drame quotidien, qui était la peinture. »
Marguerite Duthuit-Matisse, 1970
Le Musée d’Art Moderne de Paris présente une exposition inédite d’Henri Matisse (1869-1954), l’un des plus grands artistes du XXème siècle. Rassemblant plus de 110 œuvres (peintures, dessins, gravures, sculptures, céramique), elle propose de montrer le regard d’artiste et de père que Matisse porte sur sa fille aînée, Marguerite Duthuit-Matisse (1894-1982), figure essentielle mais discrète de son cercle familial.

L’exposition présente de nombreux dessins rarement sinon jamais montrés au public, ainsi que d’importants tableaux venus de collections américaines, suisses et japonaises exposés en France pour la première fois. Des photographies, documents d’archives et œuvres peintes par Marguerite elle-même complètent l’évocation de cette personnalité méconnue du grand public.

Depuis les premières images de l’enfance jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, Marguerite demeure le modèle de Matisse le plus constant – le seul à avoir habité son œuvre au cours de plusieurs décennies. Porteurs d’une franchise et d’une intensité remarquables, ses portraits trahissent une émotion rare, à la hauteur de l’affection profonde que Matisse portait à sa fille. L’artiste semblait voir en elle une sorte de miroir de lui-même, comme si, en la dépeignant, il accédait enfin à l’« identification presque complète du peintre et de son modèle » à laquelle il aspirait.

Organisée de manière chronologique, l’exposition témoigne de la force du lien qui unissait l’artiste et sa fille, et permet d’appréhender l’immense confiance et le respect qu’ils se vouaient mutuellement. Elle est aussi l’occasion de découvrir le destin fascinant d’une femme hors du commun, qui joua un rôle de premier plan dans la carrière de son père.

Aînée des trois enfants Matisse, Marguerite naît en 1894 de la relation éphémère que l’artiste, alors jeune étudiant en peinture, entretient avec son modèle Caroline Joblaud. Reconnue par son père, elle grandit aux côtés de Jean (1899-1976) et Pierre (1900-1989), fils de Matisse et de son épouse Amélie. « Nous sommes comme les cinq doigts de la main », écrira plus tard Marguerite à propos de ce noyau familial très soudé.

Son enfance est marquée par la maladie et la souffrance : à l’âge de sept ans, elle subit une première trachéotomie dont elle dissimulera longtemps la cicatrice sous un ruban noir, attribut distinctif de nombre de ses portraits. Privée d’une scolarité normale en raison de sa santé fragile, elle devient une authentique « gosse d’atelier », témoin attentif et quotidien du travail de Matisse. « Tout l’esprit de la famille était dirigé sur l’effort du père », se souviendra-t-elle. Sa disponibilité l’amène à prêter son visage aux recherches plastiques du peintre, lequel trouve en sa fille un modèle patient et bienveillant, prêt à accueillir ses expérimentations formelles les plus audacieuses.

En 1905, dans l’Intérieur à la fillette (The Museum of Modern Art, New York), Matisse dépeint Marguerite dans la touche vibrante et colorée caractéristique du fauvisme. L’année suivante, l’intérêt sensible du peintre pour sa fille se déploie dans un superbe ensemble de tableaux et dessins réalisés à Collioure, tandis que la sage écolière aux yeux baissés (Marguerite lisant, Musée de Grenoble) évolue en une fière adolescente affrontant le regard du spectateur (Musée Picasso, Paris). Plus frontale encore, la magistrale Marguerite au chat noir de 1910 (Centre Pompidou, Paris) précède la géométrisation austère et radicale de Tête blanche et rose (Centre Pompidou, Paris).

Au cours de la Première Guerre mondiale, les portraits de Marguerite se multiplient. La fille du peintre y apparaît comme une jeune femme élégante, habillée avec raffinement et coiffée de chapeaux élaborés. Alors que Matisse s’installe progressivement à Nice, elle fait l’objet d’une importante série de portraits au balcon, emmitouflée dans un large manteau à carreaux, avant de figurer au premier plan de la composition monumentale du Thé (LACMA), évocation du jardin familial à Issy-les-Moulineaux.

En 1920, Marguerite apparaît à nouveau, épuisée et convalescente, dans une série d’œuvres réalisées après une douloureuse opération de la trachée. Matisse s’y devine en père inquiet et empli de tendresse pour sa fille enfin libérée de sa cicatrice et de son ruban. Exécutées à Étretat, elles figurent parmi les derniers portraits individualisés que Matisse réalise de sa fille avant une interruption de vingt-cinq ans. Si Marguerite continue de poser pour son père au début des années 1920, c’est désormais au titre de figurante, dans des tableaux et dessins qui intègrent presque toujours un second modèle professionnel, Henriette Darricarrère. Complices, les deux jeunes femmes arborent des tenues recherchées, de bal ou de carnaval, dans des décors niçois riches en couleurs.

En 1923, Marguerite épouse l’écrivain Georges Duthuit et disparaît des tableaux de son père. Elle en demeure néanmoins très proche, endossant le rôle d’intermédiaire entre Matisse, désormais installé à Nice, et les innombrables sollicitations de collectionneurs, historiens, conservateurs et marchands d’art. Redoutablement précise et exigeante, c’est elle qui supervise le tirage des gravures de son père à Paris. Dévouée à la défense de l’art de Matisse, elle accroche des expositions à Berlin et Londres et, plus tard, aura la charge du catalogue raisonné de son œuvre, tâche jamais achevée. Une salle de l’exposition est ainsi consacrée au rôle primordial joué par Marguerite dans la carrière de son père, de même qu’à ses propres incursions dans le domaine de la peinture puis de la mode.

« Moi je suis faite de la substance des guerriers, des ardents », écrivait Marguerite en 1943. Son courage et son intégrité indomptables s’illustrent au cours de la Seconde Guerre mondiale, lorsqu’elle est arrêtée puis torturée pour faits de résistance. Les derniers portraits datent de 1945, alors que le peintre découvre, bouleversé, les immenses dangers et souffrances endurés par sa fille. Poignante, cette ultime série de dessins et lithographies fait écho à un ensemble de portraits tout aussi émouvants que Matisse réalise de son petit-fils Claude, enfant unique de Marguerite, au cours de ces années sombres.

En fin d’exposition, une projection vidéo conçue par la réalisatrice Elisabeth Kapnist retrace la vie de Marguerite par-delà l’art et la carrière de son père, à partir de dizaines de photographies d’archives. 

Préfacé par Barbara Duthuit dont le soutien a été déterminant, le catalogue s’appuie sur plusieurs années de recherche dans les Archives Matisse, et complète l’exposition en apportant des éléments plus approfondis sur la vie de Marguerite et l’œuvre de son père, ainsi que des extraits inédits de la correspondance entre père et fille. Publiée par les Editions Grasset, la première biographie de Marguerite Matisse, écrite par Isabelle Monod-Fontaine, spécialiste mondialement reconnue de l’œuvre du peintre, et Hélène de Talhouët, paraît également à l’occasion de l’exposition.

Parallèlement à l’exposition, une expérience de réalité virtuelle réalisée par TSVP et Lucid Realities est proposée autour de La Danse de Matisse, chef d’œuvre des collections du Musée d’Art Moderne de Paris.

Musée d’Art Moderne de Paris
11 Avenue du Président Wilson 75116 Paris

26/03/25

Exposition José Antônio da Silva @ Musée de Grenoble - "Pintar O Brasil"

JOSÉ ANTÔNIO DA SILVA (1909-1996) 
PINTAR O BRASIL 
Musée de Grenoble
12 avril - 6 juillet 2025

Jose Antonio da Silva
José Antônio da Silva 
Autoportrait, 1973
Collection Orandi Momesso
© José Antônio da Silva
Crédit photographique : Sergio Guerini

Jose Antonio da Silva
José Antônio da Silva 
Nature morte en pointillisme, 1951
Collection Fernanda Feitosa et Heitor Martins
© José Antônio da Silva
Crédit photographique : Ana Francisca Barros

A travers une quarantaine de tableaux issus de collections muséales et privées, le musée de Grenoble présente sa première exposition monographique en Europe de l’artiste brésilien JOSÉ ANTÔNIO DA SILVA (1909-1996). Un événement qui s’inscrit dans la saison Brésil-France 2025 qui met notamment en avant les questions du climat et de la transition écologique.

Personnalité atypique issue du monde paysan de la région de Sao Paulo au début du XXe siècle, débordant d’énergie créatrice, peintre, orateur, écrivain, chanteur, José Antônio da Silva est l’incarnation de l’artiste populaire autodidacte engagé dont l’originalité lui a valu parfois le surnom de « Van Gogh brésilien ». Reconnu pour ses qualités de coloriste par deux éminents critiques lors d’une exposition locale en 1946, José Antônio da Silva se voit ouvrir les portes des galeries, musées et foires (Biennale de Sao-Paulo & de Venise à plusieurs occasions).

Jose Antonio da Silva
José Antônio da Silva 
Le Renversement, 1949
Collection Marta et Paulo Kuczynski
© José Antônio da Silva
Crédit photographique : Alexandre Santos Silva

Jose Antonio da Silva
José Antônio da Silva 
Sans titre, 1980
Collection Alexandre Martins Fontes
© José Antônio da Silva

Sa peinture de prime abord joyeuse et fortement marquée par le folklore, est avant tout le moyen de dénoncer la dure réalité sociale du monde paysan brésilien : la récurrence des sujets tels que les plantations intensives, les paysages détruits, les aléas climatiques sont autant de messages délivrés par son oeuvre sur les conséquences de la mondialisation vis-à-vis du monde rural auquel l’artiste est viscéralement attaché. Sans nul doute la découverte de cet artiste permettra-t-elle de mesurer les liens que son œuvre tisse avec les productions de l’art brut rassemblées par Jean Dubuffet dès 1948 et de porter un regard nouveau sur l’art brésilien présent dans les collections du musée de Grenoble.

Commissaire de l’exposition :
Gabriel Perez-Barreiro, directeur artistique du Musée Universitaire de Navarre

Commissaire de la saison du Brésil en France : 
Emilio Kalil, directeur de la Fondation Iberê Camargo, Porto Alegre, Brésil

MUSÉE DE GRENOBLE
5 place Lavalette - 38000 Grenoble 

22/03/25

Exposition Frank Bowling @ Hauser & Wirth Paris - « Frank Bowling. Collage »

Frank Bowling. Collage
Hauser & Wirth Paris
22 mars – 24 mai 2025

« Frank Bowling. Collage », la première exposition personnelle de l’artiste en France, s’intéresse à sa pratique du collage en tant qu’outil à la fois conceptuel et technique. Cette exposition rassemble des oeuvres réalisées depuis le début des années 2000 jusqu’à aujourd’hui — de fait, à l’âge de 91 ans, Frank Bowling continue de peindre quotidiennement. L’exposition s’articule autour de quatre nouvelles peintures monumentales, présentées dans la galerie du rez-de-chaussée. Ces oeuvres de grand format, dont l’impressionnante « Skid » (2023) de 4,4 mètres de haut, composées de plusieurs panneaux, renouvellent son usage des toiles collées et du marouflage, des techniques qui occupent depuis longtemps une place importante dans son processus artistique. L’exposition s'accompagne d’un programme éducatif, le premier du genre pour la galerie parisienne de Hauser & Wirth. Porté par la passion commune de l’artiste et de Hauser & Wirth pour l’éducation et la pédagogie, ce programme propose une journée d’étude le lundi 28 avril 2025 dans les espaces de la galerie, ainsi que des ateliers dédiés aux élèves des écoles de la région parisienne. (voir ci-dessous).

L’attirance de Frank Bowling pour le collage s’inspire en partie des découpages d’Henri Matisse, qu’il découvre pour la première fois à la fin des années 1950, puis à nouveau lors de la rétrospective organisée par le MoMA à New York en 1992. Dans un article paru dans le numéro d’hiver 1999 de « Modern Painters », Bowling est invité à réfléchir sur sa carrière et à sélectionner une oeuvre ayant profondément nourri, voire transformé sa vision artistique. Il choisit « L’escargot » (1953) de Matisse, dont il rend hommage à travers plusieurs de ses collages qui font directement référence au motif en spirale, notamment « Back to Snail » (2000). 

Les premières expériences conceptuelles de Frank Bowling avec le collage se retrouvent dans ses créations dès les années 1960. En évoquant ses ambitions matérielles, il explique : « Je voulais marier tous ces éléments disparates – la couleur, le maniérisme, le lieu où l’on peint, ce fandango de styles – pour composer une oeuvre puissante qui rassemble des aspects de la peinture, de la sculpture et de l’architecture [...] s’associant pour former quelque chose de nouveau ». 

Les oeuvres sélectionnées pour cette exposition témoignent également de l’évolution de l’intégration d’objets trouvés dans la pratique de Bowling. Depuis les années 1980, divers matériaux, tels que des jouets d’enfants ou du matériel médical, ont été incorporés dans ses peintures. Dans « Skid », par exemple, on distingue des fragments découpés dans un sac en plastique médical, un tube en relief, des ficelles et des bandes de toile détachées. Ces éléments, extraits d’un quotidien spécifique, offrent un premier point d’accès à l’oeuvre, tout en portant une signification personnelle pour Bowling, dessinant ainsi une sorte de document autobiographique. Ces objets, intégrés directement à la surface plane de l’image avec la fluidité translucide du gel acrylique et de la peinture, rompent et jaillissent de la toile. « J’ai envie d’y jeter des détritus et de les regarder nager avant qu’ils ne se fixent », confie Bowling, « cela me donne l’impression d’avoir une vue d’ensemble sur ce que j’ai traversé dans ma vie ». 

Programme éducatif

L’exposition sera accompagnée d’un programme éducatif, dans le cadre des activités d’éducation globales de Hauser & Wirth. Coorganisée par les universitaires Altair Brandon-Salmon et Ed Kettleborough, cette journée d’études s’articulera autour de trois tables rondes thématiques consacrées à plusieurs facettes de l’œuvre de Frank Bowling : la peinture et le processus, un art transatlantique et le modernisme. Des spécialistes tels que Ben Bowling, Leon Wainwright, Indie A. Choudhury, Ana Teles, Kate Keohane et Artie Foster interviendront au cours de ces discussions tandis que le public sera encouragé lui aussi à s’exprimer librement en présence des peintures exposées.

Cet évènement est la première rencontre académique dédiée à Frank Bowling depuis sa rétrospective à la Tate Britain à Londres en 2019. Elle représente une opportunité précieuse d’enrichir les perspectives de l’histoire de l’art sur son travail.

Dans un souci d’accessibilité et de sensibilisation à l’art, des ateliers destinés aux élèves de cinquième et quatrième des écoles de la région seront organisés dans le cadre de l’exposition. Animés par Susi Sahmland, responsable des programmes éducatifs du Frank Bowling Studio, en collaboration avec l’équipe éducative de Hauser & Wirth, ces ateliers stimuleront la réflexion et l’expérimentation artistique en lien avec l’œuvre du peintre. 

Frank Bowling - Brève biographie

Sir Frank Bowling OBE RA est reconnu comme l’un des grands peintres contemporains. Né au Guyana en 1934, il arrive à Londres en 1953 et obtient la médaille d’argent en peinture au Royal College of Art en 1962. Dès le début des années 1960, Bowling se distingue sur la scène artistique londonienne, en développant un style singulier alliant figuration, symbolisme et abstraction.

Après s’être installé à New York en 1966, son adhésion au modernisme le conduit à se concentrer davantage sur le matériau, le processus et la couleur, si bien qu’en 1971, il abandonne le recours à l’imagerie figurative. Les emblématiques « Map Paintings » (1967-1971), qui présentent des étendues terrestres reconnaissables d’Amérique du Sud, d’Afrique et d’Australie peintes au pochoir, figurent sa transition vers l’abstraction pure. Il expose six de ses grandes « Map Paintings » dans le cadre d’une exposition personnelle au Whitney Museum of American Art en 1971. De 1973 à 1978, Bowling expérimente avec les notions de hasard et d’« accidents contrôlés » avec ses saisissantes « Poured Paintings », réalisées en déversant la peinture d’une hauteur de deux mètres.

Frank Bowling devient membre de la Royal Academy en 2005, reçoit l’Ordre de l’Empire britannique pour sa contribution aux arts en 2008 et est nommé chevalier à l’occasion de l’anniversaire de la Reine en 2020. Ses œuvres figurent dans une soixantaine de collections à travers le monde et ont fait l’objet de nombreuses expositions collectives et individuelles, notamment l’exposition itinérante « Mappa Mundi » de 2017 à 2019, la très populaire rétrospective à la Tate Britain en 2019 et l’exposition magistrale « Frank Bowling: Americas », qui a voyagé du MFA Boston au SFMOMA entre 2022 et 2023. En 2022, il est lauréat du prix Wolfgang Hahn, qui récompense des artistes d’exception de la scène de l’art contemporain.

Aujourd’hui, la grande maîtrise de Frank Bowling en matière de peinture et ses explorations de la lumière, de la couleur et de la géométrie intègrent l’utilisation innovante d’ammoniaque et de lavis multicouches. Son incessante réinvention de la surface peinte se poursuit dans ses œuvres récentes, expérimentant avec des empâtements texturés, des gels acryliques, des collages, des toiles cousues ainsi que des pigments métalliques et nacrés. Travaillant quotidiennement dans son atelier du sud de Londres, Frank Bowling demeure inlassablement animé par sa fascination pour les possibilités infinies et radieuses offertes par la peinture.

HAUSER & WIRTH PARIS
26 bis rue François 1er, 75008 Paris

09/02/25

Exposition Modigliani / Zadkine @ Musée Zadkine, Paris - "Modigliani / Zadkine. Une amitié interrompue" - Présentation de l'exposition + catalogue

Modigliani / Zadkine
Une amitié interrompue
Musée Zadkine, Paris
14 novembre 2024 - 30 mars 2025

Amedeo Modigliani 
Cariatide, vers 1913-1914 
Dessin (graphite, lavis d’encre, pastel)
Paris, musée d’Art Moderne de Paris

Amedeo Modigliani 
La Bourguignonne, 1918 
Huile sur toile 
Collection particulière

Cette exposition au Musée Zadkine est la première à s’intéresser à une amitié artistique jamais explorée jusqu’alors, celle qui unit le sculpteur Ossip Zadkine au peintre Amedeo Modigliani

A travers près de 90 oeuvres, peintures, dessins, sculptures mais également documents et photographies d’époque, elle propose de suivre les parcours croisés de Modigliani et Zadkine, dans le contexte mouvementé et fécond du Montparnasse des années 1910 à 1920. Bénéficiant de prêts exceptionnels de grandes institutions - le Centre Pompidou, le musée de l’Orangerie, les musées de Milan, Rouen et Dijon - ainsi que de prêteurs privés, le parcours fait se confronter, comme au temps de leurs débuts artistiques, deux artistes majeurs des avant-gardes, et permet de renouer les fils d’une amitié interrompue. 

Ossip Zadkine rencontre Amedeo Modigliani en 1913 : les deux artistes, fraîchement débarqués à Paris, rêvent chacun de devenir sculpteurs et partagent alors le « temps des vaches maigres » comme l’écrira Zadkine dans ses souvenirs. Cette amitié, aussi brève que féconde sur le plan artistique, est interrompue par la Première Guerre mondiale. Modigliani abandonne la sculpture pour la peinture, sur le conseil de marchands. Zadkine s’engage comme brancardier en 1915, avant d’être gazé et d’entamer une longue convalescence. Les deux artistes se retrouvent brièvement au sortir de la guerre, avant que leurs voies ne divergent à nouveau. Modigliani connaît un succès croissant avec ses peintures, mais il meurt prématurément à 35 ans, en 1920, tandis que Zadkine entame une longue et fructueuse carrière de sculpteur. Zadkine n’oubliera pas Modigliani et conservera précieusement le portrait fait par son ancien camarade, dont la gloire posthume ne fait que croître, à tel point que « Modi » devient l’une des figures mythiques de l’art moderne. 

L'exposition se déroule en cinq parties :

Modigliani / Zadkine : des débuts à Paris sous le signe de la sculpture

L’exposition débute en présentant côte-à-côte une sélection d’œuvres de Modigliani et Zadkine réalisées entre leurs arrivées respectives à Paris – 1906 pour Modigliani, 1910 pour Zadkine – et les débuts de la Première Guerre mondiale. Lorsque Zadkine rencontre Modigliani en 1913, celui-ci s’adonne pleinement à la sculpture, depuis sa rencontre avec Brancusi en 1909. La parenté de leur quête artistique ne peut que rapprocher les deux artistes : tous deux veulent rompre avec l’esthétique académique et se tournent vers de nouveaux modèles, puisés dans l’Égypte ancienne, les arts khmers et africains. Modigliani cherche un type de visage idéal, à l’ovale accusé et aux yeux en amande dont Zadkine se souviendra encore dans les années 1920, lorsqu’il sculptera à son tour une magnifique série de têtes idéales. 

Modigliani / Zadkine : Une amitié interrompue (1918-1920)

Dessins et portraits peints de Modigliani, accompagnés d’une magnifique sélection de gouaches de Zadkine, illustrent ici les chemins divergents qu’empruntent Zadkine et Modigliani au sortir de la Première Guerre mondiale. La guerre met un terme brutal à l’amitié des deux artistes. Trop fragile pour s’engager, Modigliani est réformé et renonce définitivement à la sculpture, sur le conseil de son marchand Paul Guillaume. Zadkine s’engage dans la Légion étrangère : affecté à l’ambulance russe en 1915 comme brancardier, il est gazé en 1916, puis définitivement réformé en octobre 1917. Les chemins des deux artistes se croisent à nouveau brièvement à la fin de la guerre, avant la mort prématurée de Modigliani en janvier 1920. 

A Montparnasse, les affinités électives

Un magnifique ensemble de « portraits d’amitié » dessinés par Modigliani, met en scène les « Montparnos » que Zadkine et Modigliani fréquentèrent tous deux au temps de leur amitié, tels Max Jacob, Chana Orloff ou André Salmon. Modigliani était en effet célèbre pour les portraits qu’il croquait rapidement, à la terrasse des cafés, en échange d’un verre ou d’un café, ou simplement en gage d’amitié et de reconnaissance. Le portrait qu’il fit de Zadkine, l’un des chefs-d’œuvre de la collection, s’inscrit indubitablement dans cette veine et constitue l’un des fleurons de l’ensemble.

Zadkine et le mythe Modigliani

Ici, documents, films et photographies, témoignent de l’ampleur du « mythe Modigliani » et montrent la part active prise par Zadkine dans l’édification de la légende. La mort de Modigliani, emporté par une méningite tuberculeuse le 24 janvier 1920, constitue un traumatisme pour la communauté d’artistes installés à Montparnasse. Dès les années 1920, la légende s’empare de cet artiste au destin tragique. Ceux qui l’ont connu et admiré de son vivant, livrent tour à tour leur témoignage.

Zadkine ne fait pas exception : dès 1930, le sculpteur évoque son ami dans un numéro spécial dédié à Modigliani. Dans ses souvenirs, publiés un an après sa mort en 1967, Zadkine brosse un éloquent portrait, haut en couleurs, de « Modi » et apporte ainsi sa pierre à l’édification de la légende du « prince de Montparnasse ».

Pour évoquer cette amitié artistique, le plasticien Ange Leccia a choisi de réaliser un film, intitulé Adelia, Zadkine et Modigliani. Il met en scène une adolescente d’aujourd’hui en train de regarder des portraits photographiques des deux artistes, dont les images fantasmatiques se superposent et s’estompent, en écho à la légende qui entoure les deux artistes. 

Des extraits d’une émission de 1963 avec Blaise Cendrars et Ossip Zadkine évoquant leur jeunesse avec Modigliani viennent enrichir cette partie illustrant le mythe. 

Un temple pour l’humanité

Avec sa scénographie volontairement immersive et spectaculaire, la dernière partie met en scène le rapport qu’entretinrent chacun des deux artistes à l’architecture et au sacré, à travers le motif du Temple. Les têtes sculptées par Modigliani dans les années 1910 sont en effet conçues comme un ensemble décoratif devant s’intégrer dans un spectaculaire « temple de volupté » soutenu par des « colonnes de tendresse » (comme l’écrivait le marchand Paul Guillaume) qu’auraient symbolisé de souples femmes-cariatides. Ce motif de la cariatide, inlassablement dessiné par Modigliani est également repris à maintes reprises par Zadkine et donne lieu à certains chefs-d’œuvre du sculpteur, dont la réputation avant-guerre tient largement à ses grands bois sculptés, avatars modernes des divinités antiques. 

Modigliani / Zadkine vu par les artistes d’aujourd’hui

Afin d’ancrer le dialogue entre Modigliani et Zadkine dans l’actualité artistique, trois artistes ont été invités à contribuer au catalogue : Giuseppe Penone, qui possède dans sa collection personnelle une Cariatide attribuée à Modigliani, ainsi qu’Ange Leccia et Ivan Messac. 

COMMISSARIAT DE L'EXPOSITION

Cécilie Champy-Vinas, conservatrice en chef du patrimoine, directrice du musée Zadkine
Thierry Dufrêne, professeur d’histoire de l’art contemporain à l’Université Paris Nanterre
Avec la collaboration d’Anne-Cécile Moheng, attachée de conservation au musée Zadkine

LE CATALOGUE DE L'EXPOSITION


Modigliani Zadkine
Une amitié interrompue
Edité par le Musée Zadkine et Paris Musées
L’ouvrage met l’accent sur l’amitié de deux artistes qui se sont croisés et influencés réciproquement dans le contexte mouvementé et fécond du Montparnasse des années 1910-1920, et prolonge cette évocation jusqu’à nos jours, par le regard de trois artistes contemporains. Sous la direction de Cécilie Champy-Vinas et Thierry Dufrêne. Avec les contributions de Diederik Bakhuÿs, Cécilie Champy-Vinas, Thierry Dufrêne, Flavio Fergonzi, Véronique Gautherin, Ange Leccia, Ivan Messac, Marianne Le Morvan, Maureen Murphy, Anne-Cécile Moheng, Giuseppe Penone. 16 x 24 cm, relié, 160 pages, 130 illustrations : 30 €
MUSÉE ZADKINE, PARIS
100 bis, rue d’Assas - 75006 Paris